Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 302 Juin 2019
Lait de chèvre et viande
Des marchés porteurs pour le lait comme pour la viande
Les productions caprines sortent leur épingle du jeu en ce début d’année. Le secteur laitier est marqué par des approvisionnements tendus, mais les transformateurs ont bien maintenu leurs fabrications et la valorisation des fromages progresse sur le marché domestique.
Le secteur de la viande de chevreau a été marqué par une date de Pâques tardive, mais la demande à l’export a tiré le marché… et les prix.
Malgré une collecte baissière en France et l’effondrement des importations, les fabrications de fromages de chèvre se sont bien maintenues, au détriment de la reconstitution des stocks de produits de report. Alors même que les disponibilités se tendent, la dynamique de la consommation domestique tire le marché.
Une collecte toujours baissière
A 153 millions de litres fin avril, la collecte cumulée de lait de chèvre a baissé de 2% par rapport à 2018, soit près de 3 millions de litres. Malgré un cheptel haussier selon l’enquête cheptel du SSP de fin 2018, la mauvaise qualité des fourrages distribués en début d’année a freiné les performances zootechniques des chèvres. Par ailleurs, ce repli est accentué en cette période de hausse saisonnière de la collecte par un effet « décalage des naissances » début 2019, qui a entrainé un retard de démarrage des lactations. La baisse de collecte dans l’Hexagone semble en effet ralentir, à seulement -1% en avril contre près de -3% en janvier et -2% en février et mars. On devrait ainsi vraisemblablement assister à une récupération des volumes à partir du pic de collecte de mai.
Les importations s’effondrent
Simultanément à la baisse de collecte française, les importations de produits de report se sont effondrées (-55% /2018 ;-24 millions de litres), à près de 20 millions de litres au 1er quadrimestre. Cette chute s’explique par la baisse des disponibilités en Espagne, où la collecte a été amputée de 4% au 1er trimestre (-5 millions de litres), et surtout par l’explosion consécutive du prix du lait espagnol, devenu moins attractif. Au final, la réduction des importations est responsable de près de 89% de la baisse des approvisionnements des transformateurs français, qui ont atteint 173 millions de litres en cumul sur 4 mois, soit un niveau similaire à celui des années 2013 et 2014 marquées par une pénurie de fromages de chèvre. Afin de fournir le marché en produits caprins, les transformateurs se sont ainsi trouvés dans l’impossibilité de reconstituer les stocks de produits de report nécessaires au maintien des fabrications en fin d’année : à 4 484 t fin avril, ils ont chuté de près de 51% /2018.
Les fabrications se maintiennent tant bien que mal, pour un marché domestique dynamique
Malgré cet approvisionnement en berne, les transformateurs ont maintenu leurs fabrications de fromages de chèvre à près de 32 000 tonnes cumulées sur le premier quadrimestre. Les transformateurs ont ainsi privilégié un marché intérieur étonnamment dynamique : malgré un prix moyen en hausse de 2%, les achats des ménages ont bondi de près de 2% en volume depuis le début de l’année selon le panel IRI-CNIEL, soit une progression supérieure à la tendance de +1% observée sur les 3 années précédentes. En revanche, les exportations de fromages de chèvre ont souffert de la baisse des disponibilités avec un repli de 10% sur 4 mois, à 8 250 t. Les fabrications de yaourts ont même bondi de 10%, à 4 260 tonnes. Seul le conditionnement de lait de consommation est à la peine, avec un repli de 2% /2018 à un peu plus de 5,4 millions de litres sur quatre mois.
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Un marché du chevreau bien orienté à Pâques
Après plusieurs années sous pression, le prix du chevreau engraissé a bien progressé en 2019. La date tardive de Pâques a poussé les opérateurs à congeler davantage de volumes en mars, dont les volumes ont été quasi-intégralement écoulés à l’export.
La cotation du chevreau rebondit
Après plusieurs années sans évolution notable, le prix du chevreau engraissé de 11 kg a connu une nette progression en avril. A 3,40 € / kg vif les deux semaines précédents Pâques, il a bondi de près de 20 cts par rapport au pic pascal de 2018 et de 23 cts /2017. La cotation a ainsi retrouvé le niveau pratiqué entre 2012 et 2015, soit 5 cts sous le record de 2011. Cette hausse devrait booster le résultat des engraisseurs, malgré un prix de la poudre de lactosérum, qui constitue l’essentiel des charges d’engraissement des chevreaux, relativement élevé.
Des abattages en progression
Boostés par des disponibilités abondantes, dans le sillage de la hausse du cheptel de reproductrices, les abattages de chevreaux ont progressé de près de 2% en cumul à avril, à près de 362 500 têtes. Mensuellement, les effectifs abattus se sont effondrés en mars (-39%), puis ont explosé de 110% en avril. La date tardive de Pâques a en effet incité les engraisseurs à garder davantage les chevreaux pour les commercialiser les deux semaines précédant la période pascale, au pic de consommation. Le poids carcasse moyen des chevreaux a ainsi progressé de 4% par rapport au bas niveau de 2018, à 5,8 kg, mais est resté finalement bien maîtrisé. En revanche, une grande partie des volumes produits en mars ont dû être congelés, faute de débouchés en frais.
Des volumes supplémentaires massivement exportés
A près de 1 410 téc de janvier à avril, les exportations cumulées de viande caprine ont bondi de près de 16% d’une année sur l’autre (+ 190 téc). Les envois de viande fraîche ont cependant reflué de 2%, à 843 téc, impactés par l’érosion graduelle de la demande italienne. Mais les expéditions de viande congelée ont explosé (+59%), notamment pour nourrir un marché portugais qui confirme son statut de 1er acheteur de viande caprine française. Les exportateurs ont bénéficié du repli des expéditions grecques, pénalisées par un cheptel dont l’érosion graduelle limite les disponibilités. De plus, les chevreaux abattus en Grèce ont vraisemblablement davantage été commercialisés sur le marché intérieur en raison de la proximité de la date des fêtes pascales catholique et orthodoxe dans un pays qui a enfin renoué avec la croissance économique. Ainsi, les exportations de viande caprine française ont été mieux valorisées, avec un prix moyen en hausse de 1,4% à 7,22 €/kg sur 4 mois. La viande fraîche s’est échangée à 7,59 €/kg éc en moyenne (+3% /2018), contre 6,68 € / kg éc (+1% /2018) pour la viande congelée.