Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 311 Avril 2020 Hebdo 1

Lait de chèvre et viande

La filière caprine à l’heure du Covid-19

La filière laitière caprine est aussi très impactée par les mesures de confinement en France. La fermeture des établissements scolaires, de restauration commerciale et de la plupart des marchés de plein air (jusqu’en semaine 14 et la reprise dans les plus petits) représentent des pertes de débouchés importants. Face aux seuls achats des ménages, les transformateurs n’ont plus aucune visibilité sur les commandes de distribution en fromages de chèvre d’une semaine à l’autre et le ramassage et les transformations sont aussi affectées.

Le ralentissement des chaînes d’approvisionnement et la fermeture de certains débouchés incitent les transformateurs à contenir la hausse saisonnière de la collecte de lait de vache.

 

Collecte dynamique début 2020

A 26 millions de litres en janvier 2020, la collecte de lait de chèvre avait progressé de +5% /2019, d’après l’enquête mensuelle laitière de FranceAgriMer. Elle aurait progressé en février de près de +3% /2019, d’après ses sondages hebdomadaires.

L’année 2020 a donc démarré fort, grâce au développement de la désaisonnalisation des troupeaux et à la bonne qualité des fourrages stockés en 2019.

La nouvelle campagne à peine lancée, les éleveurs sont incités à lever le pied par les laiteries qui, depuis la mi-mars, sont confrontées à des problèmes logistiques, mais surtout commerciaux. D’une part, elles subissent un absentéisme croissant qui perturbe et ralentit les chaînes d’approvisionnement et de fabrication (arrêts de travail et l’’observation stricte de consignes de sécurité). Selon les régions et les sites de production, cette baisse de productivité fluctuerait entre 20% et 25%, mais la situation évolue de jour en jour. Les éleveurs sont donc incités à réaliser une gestion très prudente de la conduite en élevage. La priorité doit être mise dans la gestion sanitaire du troupeau, à pouvoir anticiper la période de réforme ou tarissement des chèvres et ajuster les rations distribuées. Dans certaines situations, le passage de tout ou une partie du troupeau en monotraite peut être envisagée, pour diminuer la production.

Ainsi, les transformateurs doivent assurer le maintien de l’activité dans un contexte inédit, alors que les débouchés des produits transformés sont bouleversés. Simultanément, l’ANICAP sollicite les pouvoirs publics pour déclencher l’aide au stockage privé et la prise en charge de la destruction de lait pour les entreprises concernées.

Des débouchés réduits et imprévisibles

Les restrictions de circulation puis de confinement ont un impact évident sur les achats des ménages qui deviennent le débouché quasi exclusif des produits alimentaires. Le commerce à l’export a été divisé par deux et les ventes à la restauration hors domicile ont fléchi de -85% (quelques structures restent ouvertes, notamment institutionnelles: santé, médico-social, armée…).

Si les volumes de ventes de fromages de chèvre affichaient une progression de l’ordre de +15% en GMS ces dernières semaines, le segment haut de gamme subit des pertes de marchés importantes. En effet, les fromages AOP se vendent principalement dans des circuits spécialisés : seulement 40% des volumes sont vendus dans les GMS. Le profil des commandes des GMS en temps de crise évolue en outre, en privilégiant les produits génériques, délaissant les petites séries. De nombreux magasins ont réduit voire fermé les rayons à la coupe, plus exigeants en personnel, pour simplifier l’organisation du travail et privilégier la mise en barquette en linéaire ou en Drive, d’autant qu’ils font face à un absentéisme croissant.

Fromagers fermiers à rude épreuve

Par ailleurs, la fermeture de la restauration commerciale, puis celle des marchés de plein air affectent directement les fromagers fermiers, positionnés majoritairement sur ces marchés.

Selon les régions, ils ont pu éventuellement livrer leur lait à des laiteries ayant la capacité d’absorber ces volumes, mais à des prix de vente bien moindres que la valorisation habituelle. Ils peuvent aussi reporter l’utilisation du lait (par exemple,  en le transformant en pâte pressée, en congelant le caillé ou en stockant les produits de reports). Encore doivent-ils disposer de trésorerie pendant au moins la durée du confinement. Finalement, certains éleveurs sont contraints de détruire leur lait, faute de solutions. D’autres ont cependant l’opportunité de se joindre à des drives fermiers existants ou organisés pour l’occasion, comme à Rennes pas exemple.

Cette situation met donc en grande difficulté la filière fromagère de lait de chèvre, qui devra se relever après la crise.

Sommaire du numéro 311
Lait de chèvre et viande

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