Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 322 Novembre 2020 Mise en ligne le 17/11/2020

Lait de chèvre et viande

Conjoncture contrastée

Après un début d’année en forte hausse, la progression de la collecte nationale a ralenti, mais reste positive. Ce dynamisme, ajouté à la baisse des disponibilités de lait de chèvre en Europe, a freiné les importations des transformateurs, qui ont tout de même accru les fabrications de fromages de chèvre face à une demande toujours en hausse.

Simultanément, avec une production en repli et des prix toujours très bas, la filière chevreau tente de se relever de la crise. Les stocks de viande congelée ont été partiellement écoulés pendant l’été et devraient continuer de se résorber à Noël, deuxième pic de consommation annuel.

Lait de chèvre et viande » Lait de chèvre »

Collecte moins dynamique et fabrications fromagères croissantes

Après un début d’année en forte hausse, la croissance de la collecte nationale a ralenti, essentiellement en Nouvelle Aquitaine, principal bassin de production où la croissance est modérée, tandis que d’autres régions caprines affichent encore des collectes très dynamiques. Le dynamisme de la collecte nationale, ajouté à la baisse des disponibilités de lait de chèvre en Europe, a freiné les importations des transformateurs, qui ont tout de même accru les fabrications de fromage de chèvre.

Croissance atténuée de la collecte nationale…

A 360 millions de litres cumulés en août, la collecte de lait de chèvre a dépassé de +5% le niveau atteint en 2019 (+16 millions de litres), un taux de croissance inégalé depuis 2016. Cependant, l’amplitude de cette hausse s’est atténuée au cours de l’année :  de +7% au 1er trimestre, elle a été ramenée à +4% au 2ème, et à +3% au 3ème trimestre (estimation selon l’enquête hebdomadaire de FranceAgriMer).

En effet, en début d’année, les fourrages de qualité et les prix aux producteurs incitatifs ont encouragé la production de lait de chèvre. Pour rappel, à 616 €/1 000 l, la moyenne du prix de base au 1er semestre est 3% supérieure à celle de l’an dernier. Mais avec le confinement en plein pic de production, les transformateurs ont appelé les éleveurs à la modération pour limiter le risque de saturation de l’outil de production. Ralentie depuis avril, la croissance a du mal à redémarrer. Elle a été visiblement contenue par les canicules estivales de juillet et août.

… avec des disparités régionales

La croissance des livraisons est la plus forte en Occitanie et dans les Pays de la Loire : à près de +8% et +7% respectivement, ces régions ont livré 48 et 74 millions de litres sur les 8 premiers mois. Arrivent ensuite Auvergne-Rhône-Alpes, où la collecte a progressé de +6% /2019, à 26 millions de litres, et le Centre Val de Loire, dont la collecte a évolué de +4% /2019, à 34 millions de litres.

Finalement, la Nouvelle-Aquitaine, principal bassin caprin avec 44% des livraisons nationales, connaît pour sa part une croissance plus modérée, de +3% seulement (à 159 millions de litres), une évolution sans doute liée à la pyramide d’âges des éleveurs moins favorable de la région et à la difficile relève générationnelle.

Des importations moins ralenties

Les importations de produits de report peinent à se rétablir, après avoir chuté au printemps (-40% / 2019 au 2ème trimestre). Elles étaient toujours ralenties durant l’été de -36% /2019 en juillet et -25% /2019 en août (à 5,4 et 4,9 millions de litres importés respectivement). A 36 millions de litres fin août, les importations cumulées se situent 27% sous le volume 2019, et -60% /2018. Résultat : la part des importations dans la ressource laitière transformée en France ne cesse de se réduire, s’établissant à 9% en 2020, contre 13% en 2019 et 21% en 2018 !

En dépit de l’effondrement des importations, la fourniture du marché français est en légère croissance, grâce à la dynamique de la collecte nationale. La ressource laitière achetée par les transformateurs français a légèrement progressé de +1% /2019, à 397 millions de litres sur huit mois.

Reprise des fabrications fromagères

Malgré un approvisionnement plutôt stable, les fabrications de fromages ont progressé, de +2% /2019 à 68 000 t sur huit mois. Cette dynamique est observée pour les fromages affinés à la pièce notamment (+7% /2019, à 46 100 t), dont la bûchette reste le best-seller (+5% /2019, 33 700 t). Les transformateurs ont privilégié les fromages, face à une demande nationale toujours dynamique et à une demande à l’export en phase de reprise. Mais cette évolution s’est faite au détriment d’autres produits laitiers caprins. Cumulées sur huit mois, les fabrications de lait liquide conditionné ont baissé de -3%, à près de 10 000 t, celles de yaourts de -4% /2019, à 8 600 t.

La demande en fromage de chèvre toujours positive

Le premier confinement a fortement dynamisé les ventes de fromages de chèvre dans les rayons libre-service des GMS, conséquence de la fermeture de la RHD (qui provoqua un report de la consommation à domicile) et d’autres circuits de commercialisation (marchés de plein air et magasins spécialisés). Passé le premier confinement, les ventes en GMS ont évolué moins favorablement avec la réouverture de tous les lieux de vente et de la restauration, mais sont demeurées faiblement croissantes d’une année sur l’autre..

Ainsi, les ventes de fromages ont progressé de +5,6% /2019 en juin, +4,2% en juillet, +1,1% en août et +1,6% en septembre. Au final, les volumes commercialisés de fromages de chèvre ont progressé de +4,4% en Cumul Annuel Mobile (CAM) à P10 (fin septembre 2020), un indicateur sans-doute boostée par la dynamique printanière. Le second confinement, moins restrictif, entré en vigueur le 1er novembre devrait logiquement relancer les ventes de fromages de chèvre dans les GMS. La grande inconnue est l’ampleur du rebond…

 

 

Lait de chèvre et viande » Viande caprine »

Un précaire retour à la normale pour la filière chevreau

Le confinement au printemps a bouleversé les habitudes de consommation et la demande de viande de chevreau n’a pas été au rendez-vous. Avec une production en repli et des prix toujours très bas, la filière tente de se relever de la crise. Les stocks de viande congelée ont été partiellement écoulés pendant l’été et devraient continuer de se résorber à Noël, deuxième pic de consommation annuel.

Le cours du chevreau peine à remonter

Le confinement des Français à Pâques (pic de consommation) a impacté négativement la consommation de viande de chevreau. Les distributeurs ont limité les approvisionnements des étals, faute de visibilité sur la demande. D’importants stocks de viande congelée ont alors été constitués, et pèsent encore sur le marché. Depuis, le cours du chevreau a du mal à se relever.

Ainsi, à 2,60 € /kg vif, la cotation du chevreau engraissé a cédé 10 centimes aussitôt après Pâques, puis s’est maintenue à ce niveau pendant l’intersaison (soit près de -3% /2019). De plus, la hausse saisonnière attendue début septembre est arrivée avec un mois de retard, si bien que la cotation reste en deçà des niveaux atteints en 2019. Avec une évolution en dents de scie, la cotation moyenne de septembre à mi-novembre s’établit à 2,76 € /kg, contre 2,99 € /kg vif un an auparavant à pareille époque (soit -7% /2019).

Des abattages en repli

Avec 416 000 têtes sur 9 mois, les abattages de chevreaux ont reculé de -3,6% par rapport à 2019. Cette baisse est principalement imputable à la crise sanitaire (et le ralentissement des ramassages), et secondairement aux moindres mises bas imputables au développement des lactations longues et à la contraction du cheptel.

Le recul des effectifs abattus s’accompagne d’un allègement du poids moyen des carcasses de -2% /2019 (à 5,80 kgéc en moyenne pondérée). La date précoce de Pâques a sensiblement réduit les durées d’engraissement des chevreaux : les engraisseurs ont avancé les sorties des animaux, afin de coller au moment attendu du pic de consommation.

Au final, la production de viande de chevreau s’est contractée de -5,1% /2019, à 2 400 téc sur 9 mois.

Les stocks de congelé partiellement réabsorbés pendant l’été

A près de 1 400 téc de janvier à août, les exportations cumulées de viande caprine se sont écroulées de – 23% d’une année sur l’autre (-420 téc). En effet, elles ont été impactées par la mise en place du confinement au Portugal et en Italie, principaux débouchés à l’export de la viande caprine française. Les expéditions de viande caprine ont alors chuté de -21% en mars et -48% en avril (avec 721 téc exportées lors de la campagne pascale).

Les exportations ont été toutefois presque rétablies en juin, dès la levée des restrictions de circulation, avec 170 téc exportés,(–5% /2019). Ensuite, les envois ont été multiplié x3 en juillet (130 tec) et ont bondi de +40% en août (65 téc). Avec des volumes plus réduits qu’au printemps, le rétablissement des flux pendant l’été a tout de même permis d’écouler une part des 500 téc de viande congelée, stockées au plus haut de la crise sanitaire. Ainsi, cumulés de janvier à août, les envois de viande fraîche ont fléchi de -32% /2019, contre -13% /2019 pour la viande congelée. En valeur, ces envois ont reculé de -25% /2019, à 8,6 millions d’euros.

Les stocks devraient continuer de se réabsorber lors de la campagne de Noël, deuxième pic de consommation, où les disponibilités sont souvent peu abondantes. Mais la filière chevreau doit faire face à l’incertitude, notamment lors de la prochaine campagne de Pâques.