Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 341 Juillet/août 2022 Mise en ligne le 19/07/2022

Lait de vache

Disponibilités limitées face à une demande internationale contrastée

Malgré l’envolée du prix du lait, la production laitière n’est toujours pas relancée dans les grands bassins exportateurs. Les disponibilités en ingrédients laitiers sont plutôt limitées. Pour autant les cours de la poudre de lait manifestent des signes de fléchissement.

La demande internationale est moins ferme : certains importateurs renoncent à des achats, devenus trop onéreux quand d’autres se montrent prudents et attentistes faute de visibilité sur le devenir du marché dans les prochains mois.

En France, la production de lait conventionnel est toujours ralentie, tandis que celle de lait bio progresse plus modérément. Malgré cela les excédents de lait bio demeurent conséquents, face à une poursuite de la déconsommation des ménages en produits laitiers bio dont les hausses de prix au détail sont de même ampleur que celles des produits conventionnels.

Lait de vache » Collecte laitière »

Les prix du lait records ne relancent pas la production dans l’UE-27

En France et en Europe, les prix du lait record, qui surcompensent la flambée des charges, ne permettent pas de relancer la production laitière. En mai, la collecte a fortement reculé en volume, mais aussi dans sa composition en matière utile, en France et dans la plupart des pays de l’UE-27.

En mai, la collecte française s’est établie à 2,19 Mt, en baisse de -2% /2021, soit son plus bas niveau depuis 2013. II s’agit du 9ème mois consécutif de repli. Elle a de nouveau reculé davantage que le cheptel (-1,3% /2021), en lien avec la flambée du prix du l’aliment acheté, et une pousse de l’herbe ralentie par la sécheresse. Au pic de collecte, l’ampleur du repli (-37 000 t) d’une année sur l’autre est toutefois à nuancer car la collecte était particulièrement dynamique en mai 2021. Les livraisons sont en fait repassées au-dessus de leur niveau de 2020 (N-2) pour la première fois de l’année. Pour juin, les sondages hebdomadaires de FranceAgriMer évoquent une stabilisation de la baisse à -2% /2021.

Le repli des livraisons concerne l’ensemble des régions, à l’exception des Pays de la Loire (+0,5%), et est particulièrement marqué en Auvergne-Rhône-Alpes (-3,5%), en Occitanie (-4%) et en Nouvelle-Aquitaine (-5,8%).

Le repli est plus spectaculaire en Matière Sèche Utile (MSU) (-3,9% /2021) en raison de la baisse des taux de MG (de -0,8 g/l à 40,5 g/l) et de MP (de -0,7 g/l à 33,5 g/l).

Poursuite de la hausse du prix

En mai, à 427 €/1 000 l, le prix du lait standard 38-32 (toutes qualités) a battu un nouveau record, gagnant +13 € d’un mois sur l’autre, dans le sillage de la hausse du cours des commodités laitières. Il se situe +76 €/1 000 l au-dessus de son niveau 2021, soit une hausse de +22%. La hausse du prix réel moyen payé aux éleveurs (438 €/1 000 l) est légèrement moindre (+18% /2021), en raison de la baisse des taux d’une année sur l’autre.

En mai, d’après l’observatoire des prix du lait de la revue l’Éleveur laitier, le prix standard du lait aurait encore progressé d’un mois sur l’autre, d’environ +10 €/1 000 l.

Malgré la détente des cours mondiaux, l’IPAMPA continue de progresser

En mai, l’indice IPAMPA a poursuivi sa progression, alors que les cours mondiaux des matières premières s’étaient légèrement détendus après avoir atteint des sommets début mars, suite à l’invasion russe en Ukraine. Cette latence s’explique par le fait que les fournisseurs mettent un certain temps pour répercuter les hausses auxquelles ils sont confrontés.

L’indice progresse de +1,2 point d’un mois sur l’autre, s’établissant à 134,4 pts (+21% /2021). Par rapport à septembre 2020, mois de début de cette flambée, la progression est de + 30% après 20 mois consécutifs de hausse ininterrompue.  En mai, le prix de l’aliment acheté a encore progressé de +1% sur un mois (+26% /2021). Le prix de l’énergie s’est stabilisé à un niveau très élevé, et demeure +39% au-dessus de son niveau de 2021. Le prix des engrais s’est stabilisé à des niveaux records en mai (indice à 208 pts), et a plus que doublé en un an (+108% / 2021).

Poursuite de la hausse de la MILC

Sur le mois de mai 2021, la MILC lait de vache s’est établie à 119 €/1 000 l, son plus haut niveau depuis 2017, et ce malgré un niveau de charges qui continue de battre des records.

Sur un mois, elle a gagné + 8 €, grâce à une hausse du prix du lait (+7 € /1 000 l) et du produit viande (+4 €/1 000 l) qui ont surcompensé la hausse des charges (+2 €/1 000 l).

Sur un an, elle a progressé de +37 €/1 000 l. La hausse du prix du lait (+79 €) est presque intégralement gommée par celle des charges (+67 €), mais le bond des prix du coproduit viande (+22 € /1000 l) permet à l’indice d’excéder nettement son niveau de mai 2021.

En juin, la MILC devrait avoir continué sa progression, grâce à la poursuite de l’appréciation du prix du lait.

La collecte reste en retrait dans l’UE-27

Dans l’UE-27, la collecte a de nouveau reculé en mai d’environ -1,6% /2021, malgré un prix record moyen de 476 €/t d’après le MMO. Les livraisons sont revenues à leur niveau de 2020.

La hausse du prix du lait ne suffit plus à relancer la production alors que celle-ci compense généralement l’inflation des charges. Les livraisons continuent de reculer dans les principaux pays producteurs (-2,0% en France, -2,3% en Allemagne et -1% aux Pays-Bas en mai). Dans de nombreux pays, la plupart des leviers de croissance des exploitations ont été épuisés. De plus, la mise en place de normes environnementales pèse sur la production dans certains pays. Les productions des pays habituellement moteurs de la hausse stagnent (comme en Pologne ou en Italie), voire baissent comme en Espagne (-1% /2021) ou en Irlande (-2% /2021).

Le décrochage est encore plus net en MSU (-2,4% /2021 en mai), à cause du recul des taux de MG (-2,4%) et de MP (-2,3% /2021) dans les principaux pays producteurs. La collecte laitière en MSU est ainsi ramenée à ses niveaux 2019 et 2020.

Le prix du lait français, traditionnellement moins réactif aux évolutions des cours mondiaux des ingrédients, est celui qui progresse le moins parmi les grands pays européens (+20%) ; une hausse incomparable avec celle observée dans les pays de l’Europe du Nord, exportateurs d’ingrédients. Le prix du lait a en effet atteint 525 €/t aux Pays-Bas, 530 €/t en Irlande, soit des hausses d’environ +40% sur un an.

Le prix français est passé, depuis le début de l’année, sous la moyenne européenne pour la première fois depuis fin 2017. Même des pays comme l’Espagne (+29% /2021 à 418 €/t) et l’Italie (+28% à 480 €/t), qui fabriquent moins d’ingrédients, voient leur prix progresser plus rapidement.

Cette moindre hausse des prix en France est liée à la difficulté pour les transformateurs à faire passer des hausses de tarifs auprès des distributeurs.

En Allemagne, le prix du lait conventionnel a atteint 486 €/1 000 l en mai, et culmine 129 € au-dessus de son niveau de l’an dernier (+42%). Si la hausse est logiquement plus prononcée dans les Länder du Nord, davantage orientés dans la fabrication d’ingrédients laitiers, (+58% dans le Schleswig-Holstein à 533 €/1 000 l, +47% en Basse-Saxe), le prix a aussi fortement progressé en Bavière (+37% /2021 à 490 €/1 000 l), où la fabrication de produits PGC est pourtant prédominante. Par conséquent, l’écart de prix entre les prix allemands et français continue de se creuser. Il s’élève à 67 €/1 000 l en mai.

Lait de vache » Consommation »

Effondrement de la consommation des produits laitiers biologiques

Malgré la légère baisse du prix du lait bio payé aux producteurs, le prix des produits bio progresse dans les magasins, parfois dans les mêmes mesures que les produits conventionnels. La baisse de consommation de produits laitiers bio est spectaculaire depuis le début de l’année 2022, dans un contexte inflationniste qui engendre une descente de gamme de la consommation. Combinée à la hausse de la collecte, certes moins rapide ces derniers mois, ce recul de la demande engendre une hausse des déclassements. Heureusement, le coût du déclassement est limité grâce aux cours très élevé du conventionnel.

Effondrement de la consommation de produits laitiers bio en GMS

Depuis le retournement de la consommation observé début 2021, la chute des ventes de produits bio s’accentue au fil des mois. Le recul par rapport à 2021 est spectaculaire sur les deux premières périodes du second semestre : -18% /2021 sur le beurre, -19% pour la crème, -20% pour les fromages, -12% pour le lait liquide, 14% pour l’ultra-frais. Même si ce repli des ventes relève d’une conjonction de facteurs, sa concomitance avec l’accélération de l’inflation laisse penser que le facteur conjoncturel (l’effet pouvoir d’achat) est prépondérant.

La comparaison des ventes au détail avec les périodes 2020/début 2021 est toutefois partiellement biaisée par la fermeture de la restauration hors domicile sur ces périodes, qui se traduisait mécaniquement par une hausse des achats en magasin (suivis par les panels IRI et Kantar). Pour percevoir l’ampleur de la chute de consommation, il convient donc de comparer les chiffres de début 2022 avec ceux de 2019.

En cumul, sur les 5 premiers mois de l’année, en comparaison de 2019 sur la même période (période préalable à la crise sanitaire), la consommation a chuté de -10% /2019 sur le beurre, -11% et -15% sur l’ultra-frais. Seules les ventes de fromages ne sont pas redescendues sous leur niveau de 2019.

Les parts de marché des produits bio diminuent dans toutes les catégories de produits, en particulier sur la crème, le beurre et l’ultra-frais (chute de -12% / 2019 dans les 3 catégories). Paradoxalement, c’est sur le lait liquide que la part de marché se maintient le mieux (elle est à son niveau de 2019), alors qu’il s’agit de la gamme qui a vu se développer le plus de segmentations conventionnelles, estampillées responsables (équitables, locaux, non OGM, bas carbone, montagne …) souvent considérées comme concurrentes du bio.

D’après Kantar, sur 12 mois glissants, la consommation est revenue au niveau de la période de juillet 2018 à juin 2019 pour le beurre, avril 2018 à mars 2019 pour le lait liquide et la crème, et même octobre 2017 à octobre 2018 pour les yaourts.

Hausse du prix des produits laitiers bio dans les rayons

Paradoxalement, alors que le prix du lait bio payé aux producteurs diminue légèrement sur un an (voir plus bas), le prix des produits biologiques augmente dans les rayons, parfois presque autant que celui des produits conventionnels, dont le coût de la matière première agricole s’est pourtant envolé. Entre mai 2021 et mai 2022, le prix des fromages bio a crû de +5%, autant que les fromages conventionnels. La situation est presque la même sur les laits bio conditionnés (+4% /2021, contre +5% en conventionnel).

Pourtant, au regard du contexte de surproduction sur le marché bio, les transformateurs n’auraient pas demandé de hausse de tarifs sur la matière première agricole sur les produits bio (dans le cadre d’EGAlim2). Seule une petite partie de cette hausse des prix serait imputable à l’inflation sur la matière première industrielle (emballages, énergie), sur laquelle de légères hausses auraient été obtenues par les industriels lors du deuxième round de négociations commerciales, rouvertes à la suite de l’explosion du conflit en Ukraine.

Il n’y a finalement que sur le beurre bio que l’écart entre prix bio et conventionnel converge. Celui-ci est passé sous la barre des 15%.

La collecte progresse moins vite qu’attendu

En mai 2021, l’enquête de conversion du CNIEL anticipait une hausse du potentiel de production de +8% pour 2022 (soit +110 Ml /2021), soit un volume total de 1,34 Mrd de litres. La plupart des opérateurs n’ont en effet arrêté les conversions qu’aux prémices de la crise, en mai 2021. En conséquence, l’enquête prévoyait une croissance sensible de la collecte jusqu’à mai 2023. Cependant, depuis fin 2021, la courbe de collecte réelle dévie de la prévision (+4% au lieu des +8% attendus). En mai, la croissance annuelle de la collecte est toutefois remontée de +5% /2021, et le lait bio a passé pour la première fois la barre des 6% du volume total collecté.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce ralentissement de la croissance de l’offre. Premièrement, la dégradation de la marge laitière des exploitations bio, liées à une légère baisse de prix (-5 € sur un an, soit -1%) combinée à la très forte hausse des charges (qui affecte toutefois moins les exploitations bio, souvent plus autonomes, et qui n’utilisent pas d’engrais azotés de synthèse).

Ensuite, certains opérateurs ont mis en place des dispositifs de régulation à partir du début de l’année.

Enfin, comme pour les prévisions de collecte, la croissance du nombre de livreurs est moindre que celle anticipée par le CNIEL (dans son étude de mai 2021 avec une estimation à nombre de cessations constantes). Si le nombre de livreurs bio reste croissant, le taux est tombé à +3% /2021 en mai (la plus faible hausse annuelle depuis 5 ans), à 4 226 livreurs, loin des 4 400 producteurs anticipés.

Le prix du lait bio devrait revenir à son niveau de 2021 dès juillet

En avril et mai, le prix du lait bio standard était descendu sous la barre des 400 €/1 000 l pour la première fois depuis 2016, en raison de sa forte saisonnalité, et d’une légère baisse sur un an ( -6 €/ 2021, soit -1%).

Après être passé temporairement sous le prix du lait conventionnel, il est repassé au-dessus dès juin et devrait rejoindre son niveau de 2021 (et des années précédentes) dès le mois de juillet. Plusieurs opérateurs ont en effet annoncé une légère revalorisation du prix du lait bio, dans un contexte de flambée des charges.

La hausse des prix du lait bio se poursuit en Europe

Dans les autres pays européens, le prix du lait bio continue de progresser fortement, dans le sillage des cours des produits laitiers dans leur ensemble. En avril 2022, le prix du lait bio s’établissait à 540 €/t en Autriche (+18% /2021), 542 €/t en Allemagne (+10% /2021), 533 €/t en Suède (+18% /2021), et 550 €/t aux Pays-Bas (+14% /2021).

En Allemagne, la consommation de lait conditionné bio marque quelques signes de faiblesses depuis mars 2022, et l’accélération de l’inflation. Jusque-là, le bio continuait de gagner des parts de marché dans une gamme en plus fort déclin qu’en France, malgré une stagnation depuis mi-2021. Les ventes se maintiennent toutefois nettement au-dessus de leur niveau d’avant crise sanitaire.

Lait de vache » Marché des produits laitiers »

Fabrications et exportations européennes en repli au premier quadrimestre 2022

La collecte européenne parvient tout juste à se maintenir. Toutefois, il existe une grande hétérogénéité entre les différents pays, ce qui se répercute sur les fabrications. En effet, certains pays sont davantage tournés vers leur marché intérieur tandis que d’autres se concentrent sur l’export.

 

Malgré une collecte baissière, la France laitière a maintenu ses fabrications de fromages au 1er quadrimestre, au détriment de la poudre maigre tandis que l’Irlande et les Pays Bas orientent davantage leur mix produit vers la poudre maigre et la crème ou le beurre pour la matière grasse.

Fabrications européennes en repli

Les fabrications de produits laitiers au sein de l’UE-27 sont en baisse, à l’exception de la crème et de la poudre maigre, respectivement de +3% et +2% /2021 au 1er quadrimestre de 2022.

Les fabrications de poudres grasses enregistrent la plus forte baisse de -9 000 t à 194 000 t en cumul sur le premier quadrimestre 2022. Ce repli s’explique principalement par une chute de -30% des fabrications néerlandaises soit -13 000 t sur le premier quadrimestre. Outre une baisse de la collecte laitière, les transformateurs privilégient la poudre maigre (+14% /2021).

Au premier quadrimestre, les fabrications de fromages ont été stables en France, tandis qu’elles ont baissé de -10 000 t en Allemagne (-1% /2021), aux Pays-Bas (-3%) et au Danemark (-6%) ainsi que de -6 000 t en Pologne (-2%).

Les chiffres de fabrication de poudre maigre en Irlande ont été publiés récemment pour 2022 et surprennent car elles augmentent de +36% au 1er quadrimestre 2022, soit +11 000 t grâce notamment à des fabrications débutées dès le mois de janvier. La collecte laitière en Irlande est pourtant en baisse cette année avec un printemps plus sec, après une très belle année en 2021. Cette hausse, ajoutée aux 4 000 t supplémentaires des Pays-Bas (+14%) et de la Pologne (+7%) sur la même période compense les moindres fabrications de l’Allemagne (-14% soit -19 000 t). Toujours au 1er quadrimestre, la chute des fabrications françaises ( de -8 000 t soit-5%) est quant à elle compensée par la hausse d’autant de celles en Finlande.

En Allemagne, le repli dans les fabrications de poudre maigre a surtout eu lieu en début d’année. L’écart se réduit sur les derniers mois. En effet, les opérateurs pourraient avoir cherché à utiliser au maximum les tours de séchage sur mai et juin afin de faire du stock en prévision de difficultés d’approvisionnement en gaz au second semestre. Ceci explique en partie la très forte hausse de fabrications de poudres grasses en mai (+43% /2021).

La collecte laitière allemande a baissé de -1,7% sur la période janvier-mai 2022 /2021, ce qui se traduit par des chutes de fabrications tous produits confondus. Outre les poudres grasses, seules les fabrications de crème conditionnée se maintiennent grâce une consommation intérieure robuste.

En revanche, les achats de beurre par les ménages, très sensibles à l’envolée des prix au détail (+53% /2021 à 9,36 €/kg), ont chuté de -23% entre mai 2019 (avant la pandémie) et mai 2022 et baissé de -7% /2019 sur les cinq premiers mois. Les ventes de fromages frais aux ménages ont aussi baissé, tandis que celles de fromages à pâte semi-dure résiste à la hausse des tarifs dans les linéaires des magasins.

Repli des explorations européennes de produits laitiers

Face à ces baisses de fabrications, les exportations européennes de produits laitiers se replient. La Chine est moins présente en beurre (-28% à 6 000 t), en fromages (-17% à12 000 t), en poudre maigre (-35% à 24 500 t) notamment.

Par ailleurs, les autres marchés traditionnels, comme le Japon pour les fromages ou le Moyen Orient pour le beurre, ne sont pas particulièrement présents aux achats. Les prix élevés poussent les acheteurs à retarder leurs couvertures.

Toutefois, les échanges avec le Royaume-Uni ont repris au 1er quadrimestre 2022 notamment en beurre (+68% à 20 200 t) et en fromages (+11% à 133 300t).

Ainsi, les exportations européennes de produits laitiers baissent bien plus que les fabrications sans effet sur les prix. Si les importateurs se montrent très prudents dans un contexte de prix élevés, les exportateurs ne sont pas en reste. Face à une collecte laitière qui ne semble pas vouloir redémarrer au second semestre, certains transformateurs s’inquiètent des disponibilités qui s’annoncent faibles cet automne. De plus, les tensions géopolitiques, qui touchent notamment les disponibilités en gaz, interrogent sur les capacités de séchage et invitent les opérateurs à la prudence. Face des stocks plutôt bas voire inexistants, les vendeurs cherchent en priorité à répondre aux contrats déjà signés et reconstituent des stocks en prévision des incertitudes du second semestre.

Lait de vache » Marché des produits laitiers »

Échanges mondiaux : moindre présence des acheteurs de poudres de lait dans un contexte d’offre limitée

Les prix des ingrédients laitiers marquent le pas, notamment en Nouvelle-Zélande, alors que la production de lait chez les principaux exportateurs ne repart pas. Face à des disponibilités peu abondantes et chères, la demande mondiale se fait moins vigoureuse.

Des prix en baisse en Nouvelle-Zélande

Lors des dernières enchères physiques du Global Dairy Trade (GDT) en Nouvelle-Zélande, les prix des produits laitiers ont enregistré une forte baisse début juillet. Ceux des poudres grasses demeurent même inférieurs à ceux de la poudre maigre sous les 4 000 $/t.

Pourtant, la collecte laitière y reste particulièrement basse (-6,5% en mai /2021), ce qui limite les capacités de transformation.

En revanche du côté des exportations, celles de la Nouvelle-Zélande se sont globalement maintenues pour le beurre (+0,8% /2021) et la poudre maigre (+4%) sur les cinq premiers mois de l’année. En revanche, celles de fromages ont chuté (-11% /2021).

Elles enregistrent même une très forte baisse sur les poudres grasses, principal produit exporté (-20% /2021, à 575 000 t) notamment à destination de la Chine (-40% à 195 800 t contre 327 000 t en 2021) et du Sri Lanka (-53% à 19 500 t).

Qu’en est-il de la demande mondiale ? Une moindre présence des acheteurs serait elle à l’origine du repli des cours ?

Une consommation qui ne semble pas repartir en Chine

En premier lieu en Chine, les importations se replient alors que la consommation a été fortement réduite par les confinements. La logistique portuaire et routière à Shanghai reprend et les retards se réduisent. Toutefois, la stratégie zéro covid reste en place et pousse les consommateurs à la prudence. La fréquentation des restaurants n’a pas encore retrouvé ses niveaux antérieurs, il s’agit pourtant d’un lieu de consommation privilégié de produits laitiers. Aussi, alors que le marché s’attendait à une baisse de la consommation uniquement due à la fermeture de certaines grandes villes, la réouverture partielle de celles-ci n’entraine pas particulièrement d’appel d’air sur les produits laitiers pour le moment. Par ailleurs, la production laitière chinoise reste dynamique et continue donc d’approvisionner le marché intérieur en produits frais et en poudres grasses.

Les importations de poudre de lait entier ont chuté au mois de mai de -35% /2021. Toutefois, en cumul sur les cinq mois de l’année, les volumes importés sont similaires à l’an passé. Les échanges ont été particulièrement conséquents en ce début d’année 2022 comparés à 2021 tandis que l’an passé à cette période, la demande avait été plus forte que les années précédentes. De plus, comme nous l’avons vu, les volumes importés de Nouvelle-Zélande ont chuté, remplacés en partie par poudres grasses d’Amérique du Sud (+91% depuis l’Uruguay à 18 700 t et x8 depuis l’Argentine à 3 400 t).

Les importations de poudre maigre ont en revanche chuté de -25% sur janv-mai /2021, en provenance de Nouvelle-Zélande comme de l’UE-27. Elles sont historiquement chères et les importations en 2021 avaient été particulièrement importantes. De plus, les deux types de poudres sont interchangeables dans les recettes des industriels qui préfèrent actuellement incorporer les poudres grasses, car moins chères.

Maintien de la demande en poudres de l’Asie du Sud-Est mais en repli ailleurs

Le bassin de l’Asie du Sud-Est semble jusqu’à présent toujours aux achats en poudre maigre. L’économie dans les pays, tels que les Philippines et l’Indonésie, paraît repartir laissant la possibilité de maintenir les mêmes niveaux d’importations. Les achats de poudre maigre sont privilégiés car les industriels, à l’inverse des Chinois, ne semblent pas en mesure de les remplacer par des poudres grasses en fonction des prix. Les deux principaux exportateurs dans cette zone sont la Nouvelle-Zélande et les États-Unis. Pour la Nouvelle-Zélande, c’est une opportunité qui compense la baisse de la demande sur le marché chinois. Aussi la chute des prix des produits laitiers sur le GDT est certainement une manière de gagner en compétitivité vis-à-vis des Etats-Unis.

Les difficultés économiques et politiques au Sri Lanka l’obligent à réduire ses achats de poudres grasses, en chute de -44% /2021 sur les 4 premiers mois de 2022.

La situation économique difficile au Brésil est également responsable du ralentissement des importations de produits laitiers au 1ersemestre (-9% /2021 pour les fromages, -41% en poudre maigre et -42 % en beurre).

Pas de reprise des achats en Algérie

L’Algérie a également réduit ses importations de poudre de lait (-27% en poudre maigre et -3% en poudres grasses sur le premier quadrimestre 2022) et ce malgré la hausse des rentrées de devises énergétiques.

De plus, les exportateurs de poudre maigre sont en train de changer. Ainsi, la Turquie augmente ses parts de marché en Algérie depuis l’an passé principalement au détriment de la France. En cas de difficultés d’approvisionnement en gaz de la Pologne dans les prochains mois, les parts de marchés de ce pays risquent de diminuer également. Les États-Unis ont réussi l’an passé à exporter de la poudre maigre en Algérie durant plusieurs mois, mais cela ne semble pas se reproduire cette année pour le moment.

En résumé, si l’Asie du Sud-Est semble encore présente aux achats, de nombreux pays parmi les importateurs habituels sont bien moins présents aux achats en ce début d’année. Pour certains, leur retour sur la scène internationale semble compromis au regard de leur situation économique et politique intérieure. En revanche, pour d’autres comme l’Algérie, le Mexique, voire le Nigeria, les acheteurs pourraient patienter dans l’espoir d’une reprise de la collecte notamment en Océanie au deuxième semestre ainsi qu’une baisse des prix. Les cours des poudres de lait pourraient donc continuer de s’effriter durant l’été chez les exportateurs de façon à inciter les acheteurs à contractualiser.