Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 339 Mai 2022 Mise en ligne le 23/05/2022

Viande ovine

Le covid-19 perturbe de nouveau les flux mondiaux

Depuis janvier, les abattages sont demeurés ralentis en France, tandis qu’ils ont repris en Irlande, au Royaume-Uni, et en Espagne. Après Pâques et le Ramadan, l’offre française est retombée, contrairement au cours des agneaux qui s’est stabilisé au-dessus des 8 €/kg. En Nouvelle-Zélande, le covid-19 perturbe toujours les envois et la filière des viandes rouges rencontre une volatilité qui pourrait mettre plusieurs années à se stabiliser.

Viande ovine » France »

La cotation reste haut perchée

Après l’effervescence de Pâques, l’offre s’est repliée malgré un Ramadan qui s’est terminé deux semaines plus tard. La cotation de l’agneau français entrée abattoir est quant à elle restée haut perchée au lieu d’entamer sa baisse saisonnière. La demande se creuse traditionnellement après les fêtes, mais l’inflation pourrait accentuer le reflux saisonnier des achats d’agneau.

Quelques semaines après Pâques, le cours français se maintient

Après sa traditionnelle ascension pour Pâques, la cotation entrée abattoir s’est maintenue pour la 5ème semaine consécutive à 8,06 €/kg en semaine 19 (se terminant le 15 mai). L’écart était alors de +0,64 € /2021 et +1,59 € /2020.

Pâques terminé, l’offre s’est effondrée tandis que le cours de l’agneau s’est maintenu au-dessus des 8 €/kg durant quelques semaines.

Ce niveau de prix est bénéfique pour les éleveurs confrontés à une hausse du coût des intrants. En mars 2022, l’IPAMPA ovin viande a atteint 131,7 points (+20% /2021). L’Indice énergie et lubrifiants a bondi de +84% /2021 et celui des aliments achetés a progressé plus modérément de +17%. Toutefois ce dernier devrait encore s’apprécier dans les prochains mois. La sécheresse qui sévit ce printemps en France devrait encore accroître la tension sur le marché des grains et des aliments concentrés.

Les abattages diminuent fortement après Pâques

Principalement du fait du décalage des dates de Pâques (le 4 avril en 2021 et le 18 avril en 2022) et selon Agreste, la production abattue au mois de mars a chuté de -18% d’une année sur l’autre, à 7 700 téc. 354 500 agneaux ont été abattus, en baisse de -24% / 2021, et 41 000 réformes, en hausse de +8%, à 41 000 têtes.

Selon Ovinfos, les abattages seraient passés largement sous leurs niveaux de 2021 une et deux semaines après Pâques (S16 et 17), alors qu’on s’attendait à des abattages toujours dynamiques après Pâques, grâce à la période du Ramadan (fin le 2 mai). La baisse enregistrée en semaine 16 s’est accentuée la semaine suivante sans explication claire sur ce fort mouvement de repli : les bergeries étaient-elles vides après Pâques ? La demande pour le Ramadan était-elle trop faible pour ralentir la chute de l’offre ?

Rebond des importations de viande ovine néozélandaise en 2022

Les importations de viande ovine à destination du marché français ont légèrement reculé début 2022. Sur les deux premiers mois, la baisse est de -2% /2021, soit -190 téc.

Malgré une production britannique en légère progression, les importations de viande britannique ont fortement fléchi (-10% /2020), tandis qu’elles se sont redressées en provenance de République d’Irlande (+7%).

Les importations de Nouvelle-Zélande se sont redynamisées, à hauteur de +56% /2021. Depuis septembre 2021, les envois néozélandais vers la Chine reculent d’une année sur l’autre au profit de l’UE à 27 et de l’Amérique du Nord. La politique « zéro covid-19 » restreint l’accès au marché chinois.

La ville industrielle chinoise de Ningbo, qui abrite le 3ème plus grand port commercial du monde, a été confinée en janvier 2022 ; deux mois après, ce fut au tour de Shanghai (1er port de commerce mondial).

 

Viande ovine » UE et monde »

Reconfiguration des flux mondiaux sur fond de pandémie

Au Royaume-Uni comme en Irlande les abattages se redressent, permettant une hausse des exportations de viande ovine. En Espagne, l’augmentation des abattages fait face à une consommation intérieure très volatile : l’export en vif permet de dégager des volumes, ceux en viande étant limités. Le covid-19 continue de perturber les flux de viande ovine de la Nouvelle-Zélande vers la Chine.

Royaume-Uni : L’offre et les envois britanniques se rétablissent

De janvier à avril, la production abattue au Royaume-Uni a atteint 91 000 téc, progressant de +14% /2021 (creux de production post-Brexit en 2021) et de +4% /2020. Elle reste toutefois 6% sous son bon niveau de 2019.

De janvier à mars, les importations de viande ovine ont gagné +33% /2021, augmentant d’autant le disponible et libérant des volumes pour l’export, qui ont ainsi progressé de +26% au 1er trimestre.

La hausse des disponibilités début 2022 pèse sur le cours britannique de la viande d’agneau qui a chuté de -0,31 € /2021, à 7,13 €/kg en semaine 18 (trois semaines après Pâques et une après le Ramadan). La vigueur du marché mondial soutient tout de même le prix de l’agneau britannique qui s’établissait encore +1,79 € au-dessus de son niveau de 2020.

 Irlande : les agneaux de nouvelle saison ont remplacé les Hoggets

Le pourcentage d’Hoggets dans les effectifs abattus est aujourd’hui minimum, face à l’arrivée des agneaux de nouvelle saison, qui ne sont pour autant pas aussi nombreux que prévu face à une demande plutôt ferme.

En semaine 18, à 8,30 €/kg, la cotation de l’agneau de nouvelle saison était proche de son niveau de Pâques 2021 (+ 0,30 €/kg), toujours très élevée par rapport au creux de 2020 (+2,08 €/kg).

Sur les 18 premières semaines de 2022 (janvier à début mai), les abattages d’agneaux ont progressé de +20% /2021, à 854 000 têtes, grâce à de bonnes sorties d’Hoggets (agneaux de report) à partir du dernier trimestre 2021. Les abattages de réformes ont conjointement reculé, de -7% à 90 000 têtes.

Face à une offre en hausse, les exportations irlandaises de viande ovine ont aussi progressé : de +17% /2021, à 14 300 téc au 1ertrimestre, dont +60% vers le Royaume-Uni et +22% vers la France.

Espagne : des cours stables

A 6,74 €/kg en semaine 18, la cotation espagnole se situe nettement au-dessus de son niveau des années précédentes : +0,55 € /2021 et +1,60 € /2020. Elle est de plus relativement stable alors que l’offre augmente de façon saisonnière. Après avoir ralenti pour cause d’une météo peu propice aux barbecues, la demande intérieure s’est légèrement redressée en mai.

Le Ramadan passé, les exportations de vifs vers les pays tiers sont plus calmes, mais la France comme l’Italie continuent d’acheter des agneaux.

Sur le marché de la viande ovine, la demande est minimaliste : les envois espagnols ont régressé de -27% /2021 au 1er trimestre, dont- 33% vers la France. Depuis avril, ils reprendraient vers la France et les pays tiers, selon la presse spécialisée espagnole.

Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, les éleveurs espagnols connaissent des difficultés pour s’approvisionner en matières premières pour l’alimentation du bétail. L’Ukraine est en effet l’un des principaux exportateurs de blé, de maïs (2ème fournisseur de l’Espagne), de tournesol, de farine. Des surfaces conséquentes de luzerne auraient été retournées pour produire du tournesol, ce qui réduirait les disponibilités fourragères dans les prochains mois.

Nouvelle-Zélande : des envois vers la Chine de nouveau contraints

En Nouvelle-Zélande, les restrictions sanitaires liées au nouveau variant (omicron) ont ralenti les chaînes d’abattage et de découpe, si bien que la production abattue a chuté de -29% /2021 en mars 2022, à 44 000 téc. Au 1er trimestre, les abattages d’agneaux ont moins reculé, de -17% en effectifs et -19% en volume d’une année sur l’autre.

De plus, avec sa politique « zéro covid-19 » la Chine a de nouveau confiné une partie de sa population, ce qui perturbe le fonctionnement des ports chinois : la Nouvelle-Zélande s’en détourne alors ponctuellement en faveur de l’UE à 27 et de l’Amérique du Nord.

Les exportations de viande ovine ont en conséquence chuté de -24% /2021 en mars, pour tomber à 45 000 téc, dont – 46% vers la Chine, -1% vers le Royaume-Uni, +13% vers l’UE à 27 et +53% vers l’Amérique du Nord. Les envois de laine néozélandaise vers la Chine sont aussi freinés. En parallèle, les confinements diminuent la demande des consommateurs chinois en viande d’agneau. La filière espère que les restrictions sanitaires en Chine seront rapidement levées.