Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 340 Juin 2022 Mise en ligne le 20/06/2022

Viande ovine

Des disponibilités limitées

Les tendances amorcées début 2022 se prolongent : abattages ralentis en France et en Espagne dans une moindre mesure, mais dynamiques en Irlande ainsi qu’au Royaume-Uni ; demande des ménages, hors contexte festif, affectée par l’inflation.

En Nouvelle-Zélande, la production se rétablit depuis avril après avoir été nettement freinée par les effets du variant Omicron.

Viande ovine » France »

Le cours français perd un peu de hauteur

Le cours de l’agneau français entame sa traditionnelle baisse saisonnière avec quelques semaines de retard cette année. L’accroissement progressif des abattages, avec la sortie des agneaux d’herbe, pèse sur le marché français, face à une demande relativement modeste probablement affectée par les premiers effets de l’inflation sur les choix des ménages.

Baisse saisonnière timide et tardive du cours français

Après s’être maintenue durant 6 semaines consécutives au-dessus des 8,0 €/kg éc après Pâques, la cotation de l’agneau lourd entrée abattoir a débuté une timide et tardive baisse saisonnière en semaine 23 (se terminant le 12 juin) et s’établissait ainsi à 7,92 €/kg éc. L’écart était alors de +0,66 € /2021 et +1,36 € /2020.

La sortie des agneaux d’herbe, conjuguée à une consommation en demi-teinte (météo capricieuse et baisse du pouvoir d’achat des Français), a pesé sur le marché et fait fléchir la cotation française. Cette baisse a traditionnellement lieu juste après Pâques, mais le Ramadan qui a suivi a soutenu la demande, puis le bas niveau conjoint de l’offre et des achats a maintenu la cotation au-dessus des 8 €/kg.

Avec de tels prix entrée abattoir, l’aval semble rogner ses marges pour contenir la hausse des prix au détail, et ainsi éviter la fuite des consommateurs. Le prix moyen de la viande d’agneau vendue à Rungis a ainsi reculé de -1% /2021 en avril, puis de -2% /2021 en mai.

Les charges exceptionnellement élevées nuancent toujours ces niveaux de prix. En avril 2022, l’IPAMPA ovin viande restait particulièrement élevé (131,6 points soit +21,2 points /2021) du fait de la forte hausse des indices énergie et lubrifiants (+60% /2021) et aliments achetés (+20%). La sécheresse puis la canicule très précoces cette année, pourraient venir aggraver une situation déjà compliquée pour les éleveurs ….

Depuis janvier des abattages stables d’une année sur l’autre

Selon Agreste, les abattages de viande ovine ont bondi en avril de +24% d’une année sur l’autre, à 9 400 téc, principalement du fait du décalage de Pâques de deux semaines (le 4 avril en 2021 soit la majorité des abattages réalisés en mars et le 18 avril en 2022 donc majorité en avril). D’un côté les abattages d’agneaux (456 500 en avril)  ont bondi de +30% /2021 ; de l’autre, les réformes ont quant à elles régressé, de -2% /2021 à 44 000 têtes.

Selon Ovinfos, après ce rééquilibrage dû au décalage des dates de Pâques, les abattages français sont restés en mai sous leur niveau de 2021, qui correspond pourtant au 2ème pic de sorties d’agneaux Lacaune et au début de sortie des agneaux d’herbe.

Des importations de viande ovine en provenance d’Espagne en net repli

En mars, les importations françaises de viande ovine étaient toujours ralenties, de -7% /2021, à 7 300 téc. Le décalage des dates de Pâques (le 4 avril 2021 et le 17 avril 2022) explique au moins en partie cette baisse d’une année sur l’autre au mois de mars.

Les achats en provenance d’Espagne ont poursuivi leur baisse (-42% /2021), tandis qu’ils étaient en hausse en provenance du Royaume-Uni (+7%), de Nouvelle-Zélande (+8%) et d’Irlande (+38%).

Un disponible français recule encore

Ralentis depuis le début de l’année, les abattages et les importations affectent d’autant le disponible français, qui au 1er trimestre a chuté de -7% /2021 et 2019. Il est toutefois légèrement supérieur, de +3%, au bas niveau de 2020.

Selon le panel Kantar, le recul des achats des ménages français en viande ovine s’est accentué en mars (-35% /2021), suite au déclenchement de la guerre en Ukraine, probablement sous l’effet d’une accélération de l’inflation qui impacte le pouvoir d’achat des Français.

Viande ovine » UE et monde »

Des flux davantage orientés vers l’UE-27 et l’Amérique du Nord

Au Royaume-Uni, la hausse des disponibilités a diminué la demande de viande importée en provenance de Nouvelle-Zélande tandis qu’en Irlande, où l’offre se dynamise depuis le début d’année, les exportations de viande ovine ont repris. En Nouvelle-Zélande, où la situation s’améliore progressivement depuis avril, la production semble reprendre après avoir été ralentie par le variant Omicron du Covid-19.

Royaume-Uni : la cotation britannique entame sa baisse saisonnière

Sur une bonne lancée depuis le début d’année, la production de viande ovine britannique a bondi en avril 2022, de +22% /2021, à 24 300 t, grâce à la hausse conjointe des abattages d’agneaux (+22% /2021 à 1 million de têtes) et de réformes (+11% à 100 000 têtes), le tout conjugué à une légère hausse des poids moyens de carcasses (+1% /2021).

Face à ce disponible accru, les exportations britanniques de viande ovine ont repris, totalisant 17 800 t au 1er trimestre 2022, soit +18% par rapport au niveau exceptionnellement bas enregistré en 2021.

Les importations ont dans le même temps progressé, de +15% /2021, à 18 700 téc, venant compléter le disponible. Celles en provenance d’Irlande (x 4) et d’Australie (+62%) ont gagné du terrain tandis que les volumes néozélandais ont a contrario reculé d’une année sur l’autre (-18%).

Face à l’accélération saisonnière des abattages britanniques, la cotation s’est effritée de -1% /2021 à 7,74 €/kg éc en semaine 22, mais demeure à des niveaux historiquement élevés : +1,88 € /2020.

Irlande : le cours de l’agneau de nouvelle saison se maintient au-dessus des 8 €/kg

Après son pic pour Pâques, la cotation irlandaise, des Hoggets comme des agneaux de nouvelle saison, a plafonné à un niveau élevé au lieu de décroître de façon traditionnelle. En semaine 22, à 8,35 €/kg, elle dépassait de 0,70 €/kg son niveau de 2021 de +2,25 €/kg celui très bas de 2020.

De janvier à mai, les abattages d’ovins irlandais étaient abondants, en hausse de +16% /2021. Ceux des agneaux ont progressé de +18% à 982 000 têtes tandis que les réformes ont à l’inverse reculé de -6% en-dessous du niveau de 2021, à 109 000 têtes.

Au 1er trimestre 2022, les exportations irlandaises de viande ovine ont ainsi gagné +17% /2021, à 14 300 téc, dont +60% vers le Royaume-Uni et +22% vers la France.

Espagne : la cotation se redresse avec la baisse estivale de l’offre d’agneaux

A 6,78 €/kg éc en semaine 22, la cotation de l’agneau lourd espagnol se situe nettement au-dessus du niveau des années précédentes : +0,59 € /2021 et +1,66 € 2020. Celle-ci repart doucement à la hausse grâce d’une part à la traditionnelle diminution des abattages pour l’été et d’autre part la réactivation de la demande en HORECA (saison touristique qui contrebalance la reprise de l’inflation en mai en Espagne) et à l’export, avec la préparation de l’Aïd dans les pays arabes.

La production de viande ovine a légèrement reculé au 1er trimestre, de -3% /2021, à 27 600 téc. La production d’agneaux abattus a régressé de -6%, en effectif comme en volume (poids de carcasse stables), tandis que celle des réformes a gagné +8% en têtes et +13% en volume (alourdissement).

Les exportations de viande ovine ont conjointement reculé de -27% /2021, à 10 140 téc au 1er trimestre, et la baisse se serait accentuée en avril. A contrario, les envois d’ovins vifs ont augmenté de +19% sur la même période, à 404 000 têtes, via une demande très dynamique sur le marché jordanien.

Nouvelle-Zélande : progression des envois vers l’UE-27 et l’Amérique du Nord

La Nouvelle-Zélande a abattu 12,8 millions de moutons et d’agneaux au cours de la première moitié de la saison 2021/22 (octobre-mars), soit 256 000 tonnes en baisse de -14 % par rapport à la même période l’an dernier.

Les exportations de viande ovine ont totalisé 200 858 tonnes sur la même période, également en baisse de -14 %, correspondant à la baisse de la production.

Les exportations vers la Chine ont chuté, probablement en raison des perturbations de la navigation et des blocages qui freinent la demande tandis que vers les États-Unis elles ont augmenté, en raison d’un dollar néo-zélandais faible face au dollar américain et de la remise en route des services alimentaires après les perturbations provoquées par le covid-19.

Les exportations vers l’UE-27 ont progressé de +18% car les approvisionnements sur le continent restent tendus. Vers le Royaume-Uni, elles ont baissé de -7 % en raison d’un bon approvisionnement intérieur.