Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 359 Mars 2024 Mise en ligne le 25/03/2024

Si les cotations des réformes en Europe demeurent largement supérieures à celles des années précédentes, elles ont entamé une baisse saisonnière à mesure que les disponibilités en pâturage diminuent et que les abattages reprennent quelque peu.

ALLEMAGNE : l’inflation est restée soutenue, les abattages limités.

En Allemagne, d’après l’institut de statistique Destatis, l’inflation générale su pas de temps de un an a franchi la barre des 10% en septembre 2022 après moins de 8% un mois auparavant. Le rabais sur le carburant et le billet de train mensuel à 9 euros en vigueur cet été ont en effet expiré fin août. D’autres indicateurs ont progressé à l’instar des prix de l’alimentation : +18,7% /septembre 2021 contre +16,6% un mois plus tôt. Après trois plans totalisant près de 100 milliards d’euros (cf. article du mois précédent), le Gouvernement allemand a annoncé la mise en place d’un nouveau plan de soutien au pouvoir d’achat de 200 milliards d’euros visant à plafonner les prix de l’énergie.

En attendant de mesurer les effets de la multiplication de ces plans d’aides, les achats de viandes au détail étaient en retrait. En cumul sur les 8 premiers mois de l’année, les ventes au détail de viandes se sont repliées de -12% /2021 en volume. Pour la viande bovine, le recul a même atteint -23%. D’après AMI, outre le fait qu’en 2021 les achats au détail de viande bovine étaient dopés par la fermeture partielle de la RHD, les prix plus élevés de la viande bovine au cours des huit premiers mois de 2022 a entraîné un report partiel de consommation vers des viandes moins chères comme le porc. Il faut dire que le prix du porc à la production avait bien baissé en début d’année dans le pays affecté par la FPA, mais il a repris 10% en août/septembre.

Les abattages de réformes ont rebondi comme il est habituel en cette saison, Mais les effectifs sont restés bien en deçà des niveaux observés les années précédentes, le cheptel est en effet réduit et le prix du lait très attractif (+57% /2021 en août ; voir article lait). Entre les semaines 36 et 39, les abattages de vaches restaient en retrait (-8% /2021 et -13% /2020).

Face à cette offre automnale réduite, la demande du marché allemand en viande de réforme est toujours limitée. Les cours ont poursuivi leur léger réajustement à la baisse. Ils restent cependant très supérieurs aux années précédentes. En semaine 39, La cotation de la vache O atteignait 4,18 €/kgéc (+19% /2021 et +61% /2020) soit 13 centimes de moins qu’en semaine 35.

D’après l’enquête de mai, le cheptel bovin a de nouveau reculé pour la huitième année consécutive.  Il est ainsi tombé à moins de 11 millions de bovins (-2% /2021), avec un recul de même ampleur  des effectifs de vaches laitières et de vaches allaitantes (-2%). A noter la progression des effectifs de bovins mâles jusqu’à deux ans qui pourraient entraîner un rebond de l’offre de jeunes bovins à court ou moyen terme (voir article JB Europe).

POLOGNE : la cotation de la vache O s’est légèrement repliée

En Pologne, les cotations des réformes sont orientées à la baisse, mais restent à des niveaux élevés et supérieurs aux années précédentes. En un mois, le cours de la vache O a perdu 18 centimes (-4%) pour atteindre 4,22 €/kg de carcasse en semaine 39 (+35% /2021 et +73% /2020). Cette baisse a été amplifiée par le recul récent du zloty face à l’euro. La demande en viande polonaise fait désormais face à la progression de l’inflation alimentaire partout en Europe qui pèse sur le pouvoir d’achat des ménages.

Sur les 7 premiers mois de 2022, les abattages de vaches ont progressé, mais de manière limitée faute de disponibilités. Ils ont atteint 87 000 téc (+5% /2021, +8% /2020, +5% /2019 mais -3% /2018). En 2020 et 2021 ils avaient été affectés par le covid-19 (restriction sur la RHD dans toute l’Europe) et en 2019 par les scandales sanitaires. Ces abattages en hausse se sont traduits par un cheptel de vache en forte baisse selon l’enquête de juin, -12% de vaches laitières d’une année sur l’autre (-261 000 têtes), loin d’être compensées par une forte augmentation du cheptel de vaches allaitantes (+80 000 têtes à 356 000 têtes).

IRLANDE : progression saisonnière des abattages

En Irlande, les abattages de bovins ont été dynamiques avec le ralentissement de la croissance de l’herbe dans bon nombre de régions. Entre les semaines 35 et 39, les abattages de gros bovins étaient même supérieurs à ceux des années précédentes (+5% /2021 et +7% /2020) d’après l’indicateur hebdomadaire du ministère de l’Agriculture irlandais. Même constat pour les vaches de réforme (+14% /2021 et +1% /2020).

Face à cette progression de l’offre, les prix ont légèrement reculé, mais restent soutenus. Le cours de la vache O a perdu 11 centimes en un mois à 4,23 €/kg de carcasse en semaine 39, toujours bien au-dessus des années précédentes (+19% /2021 et +43% /2020). Même constat pour les cours des bœufs qui ont perdu 22 centimes en cinq semaines, à 4,68 €/kg (+12% /2021 et 29% /2020).

D’après Bord Bia, les niveaux élevés d’inflation sur certains marchés d’exportation clés ont entraîné une certaine réduction de la demande. Alors que la demande de viande bovine industrielle reste ferme, les ventes pour le marché de détail sont plus difficiles. En attendant, les exportations irlandaises de viande bovine réfrigérée et congelée ont progressé depuis le début de l’année. En cumul sur 7 mois, elles ont atteint 335 000 téc (+17% /2021 et +12% /2020), mais avec des performances déjà plus limitées en août (= /2021 et -3% /2020).

Enfin, d’après les résultats provisoires de l’enquête cheptel de juin, le cheptel total de bovins irlandais atteignait 7,4 millions de têtes (+0,5% /2021). La tendance observée depuis plusieurs années se poursuit : le nombre de vaches laitières a encore progressé de +1% /2021, à 1,6 million de têtes, tandis que les effectifs de vaches de races à viande continuent de se contracter (-3% /2021, à 913 000 têtes). Dans les prochains mois, l’offre irlandaise devrait rester soutenue. En effet, le nombre total d’animaux âgés de 2 ans et plus, comme ceux âgés de 1 à 2 ans, étaient en hausse (+2% chacun). A plus long terme, le constat est plus nuancé : le nombre de bovins âgés de moins d’un an a diminué (-1%), la baisse des bovins mâles en étant le principal moteur.

ROYAUME-UNI : l’offre en réformes progresse

Au Royaume-Uni, les abattages de gros bovins sont restés globalement limités d’après l’indicateur d’AHDB. Mais ce n’est pas le cas pour les vaches dont le niveau des réformes augmente habituellement en cette saison. Entre les semaines 35 et 39, les abattages de vaches se sont nettement redressés (+9% /2021 et +2% /2020).

Malgré des disponibilités plus importantes, la cotation de la vache O ne connait pas de baisse saisonnière, mais plafonne depuis plusieurs semaines à un niveau élevé : 3,71 £/kg de carcasse en semaine 39 (+26% /2021 et +41% /2020) en léger repli en euros en lien avec la dévaluation de la livre sterling, à 4,22 €/kg.

Les cotations des animaux plus jeunes restent également soutenues : 4,46 £/kg pour le bœuf R3 (soit 5,08 €/kg de carcasse ; +7% /2021 et +19% /2020).

Le cheptel bovin britannique était relativement stable au 1er juillet 2022, à 8 millions de têtes. Mais le nombre de femelles de plus de 30 mois a baissé de -2% /2021, à 2,76 millions de têtes, soit au même rythme que les vaches laitières et allaitantes (-2% et -29 000 têtes chacun).

A contrario, le nombre de bovins de moins de 30 mois a progressé de +2% à 5,15 millions de têtes. Les bovins disponibles pour la production de viande (mâles laitiers et mâles/femelles de boucherie âgés de 12 à 30 mois) étaient en hausse (+3%). Davantage de bovins devraient être ainsi disponibles pour abattage au cours du second semestre 2022.