Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 363 Juillet/août 2024 Mise en ligne le 19/07/2024

France

L’inflation alimentaire sous la barre des 1% en juin

La consommation par bilan de viande bovine et de veau a bien résisté en mai, ne reculant que qu’un pourcent par rapport à mai 2023. L’inflation a ralenti en juin, tout particulièrement dans l’alimentaire. Les exportations de viande bovine étaient encore dynamiques en avril et en mai.

L’inflation alimentaire en-dessous des 1% en juin

En juin, l’inflation a poursuivi son ralentissement entamé depuis plusieurs mois en France. D’après l’INSEE, l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) s’est établi à +2,5% sur un an (contre +2,6% un mois plus tôt). L’inflation alimentaire s’est fortement réduite par rapport au mois précédent, passant sous la barre des 1% en juin, à +0,8% sur un an (contre +1,3% un mois plus tôt). L’indice du prix des viandes n’a pas progressé en juin, sur un an (et +0,1% seulement en mai /2023). La hausse du prix de l’énergie a ralenti (+4,8% contre +5,7% un mois plus tôt) grâce au ralentissement de la hausse du pétrole, tandis que le prix des services augmente encore (+2,9% après +2,8% un mois plus tôt).

La consommation de viande bovine a bien résisté en mai

La consommation par bilan s’est bien tenue en mai, avec un recul de seulement -1% /2023 (- 1 500 téc). D’après Agreste pour les abattages, et les Douanes pour le commerce extérieur, le disponible s’est établi à 117 000 téc. Les abattages de gros bovins se sont érodés de -1% /2023 en mai, les importations de viande ont reculé de -4% et les exportations ont progressé de +10% ou + 1 800 téc.

Du fait de ces exportations dynamiques, la part d’import dans le disponible consommable en France a un peu progressé pour atteindre 26% en mai contre 25% en avril. Ce niveau reste cependant stable par rapport à mai 2023. En cumulé de janvier à mai 2024, la part d’import dans la consommation atteint 25%, comme en 2023.

Attention toutefois, les effets des éventuelles variations de stocks, importantes à certaines périodes, ne sont pas intégrés dans cette estimation et la lecture mensuelle ne doit pas être sur-interprétée.
Depuis le Brexit début 2021, les statistiques douanières sont perturbées par l’organisation des opérateurs. En effet, plusieurs exportateurs britanniques font dédouaner leurs viandes en France avant de les réexpédier vers les Pays-Bas afin de faciliter les procédures de dédouanement. Ces effets ne sont pas pris en compte ici.

Progression des ventes de haché

D’après Circana, sur les 4 dernières semaines connues (semaines 23 à 26), les ventes en valeur de bœuf haché réfrigéré ont progressé comparé à 2023 (+7%). Celles de haché congelé ont progressé aussi (+3%) mais moins fortement que le réfrigéré.

En mai, la France a exporté plus vers la Grèce et la Turquie

En mai 2024 selon les Douanes françaises, les importations totales de viande bovine (réfrigérées, congelées et transformées) ont reculé de -4% /2023 (-1 300 téc) à 28 200 téc.

Les exportations françaises totales de viande bovine ont, elles, progressé de +10% /2023 en mai, après un bond en avril de +24% (comparé au mois d’avril 2023 particulièrement bas). Elles ont atteint 19 300 téc (+1 800 téc) sans toutefois arriver aux niveaux de 2022 (-5% /2022 ou -1 100 téc).

Sur les 5 premiers mois de l’année, les importations de viande bovine réfrigérée et congelée ont reculé de -4% /2023, à 135 000 téc. Elles ont diminué depuis les principaux fournisseurs de la France : les Pays-Bas (-9% /2023 à 34 000 téc), l’Irlande (-7% à 24 000 téc) et l’Allemagne (-20% à 13 000 téc). Elles ont légèrement augmenté depuis le Royaume-Uni (+3% à 18 000 téc) et progressent plus vite depuis les origines à tarif compétitif, comme la Pologne (+11% à 14 000 téc) et l’Espagne (+15% à 9 000 téc).

De janvier à mai, les exportations françaises de viande bovine réfrigérée et congelée ont, elles, augmenté de +9%, par rapport au bas niveau de 2023, atteignant 85 800 téc (mais encore -9% /2022). Ces envois ont reculé vers l’Italie (-6% /2023 à 20 500 téc) mais étaient stables vers l’Allemagne (+1% à 16 000 téc) et progressaient légèrement vers les Pays-Bas (+3% à 15 000 téc).

Les expéditions de viande française étaient en nette hausse vers la Grèce (+14% à 14 000 téc) par rapport au bas niveau 2023, les Grecs ayant calmé le pic d’inflation de la viande en 2023 par de l’import depuis la Pologne. Les Polonais (cf article JB Europe) approvisionnant beaucoup la Turquie en 2024 (export ×4 /2023 à 20 000 téc) étaient en retrait sur le marché grec au 1er quadrimestre 2024. Les exports français vers la Grèce sont même supérieurs de +1% /2022. Nos exportations ont aussi progressé vers la Belgique (+12% à 9 000 téc), les autres pays de l’UE (+32% /2023 à 5 500 téc, soit +1 400 téc) et enfin vers les pays tiers (×2,6 /2023 à 5 900 téc, soit +3 600 téc, dont 1 900 téc grâce aux contrats avec la Turquie et 1 300 téc vers l’Algérie, au 1er trimestre). Les achats turcs seraient en train de ralentir depuis juin, mais pourraient reprendre de la vitesse en septembre, selon nos contacts locaux.

Attention toutefois, les échanges sont affectés par des flux « parasites » avec le Royaume-Uni et les Pays-Bas depuis la mise en œuvre du Brexit. Des opérateurs britanniques font dédouaner des viandes britanniques en France avant réexportation vers les Pays-Bas. Ces flux ne sont pas retranchés des chiffres ci-dessus.

Le manque d’offre soutient les prix des vaches

Le manque d’offre lié à la décapitalisation soutenait toujours les cours de vaches mi-juillet. Les cours des jeunes bovins poursuivaient leur baisse saisonnière, accentuée par une offre en légère hausse du fait de la renationalisation de l’engraissement en France.

Les cotations des vaches restent soutenues par le manque d’offre

Le recul de l’offre à abattre permet de soutenir les cours des vaches. Les cotations des vaches U et R ont gagné 2 centimes en 4 semaines, à 5,96 €/kg de carcasse pour la vache U en semaine 28 (+3% /2023) et 5,53 €/kg pour la vache R (+2%).

Les cotations des vaches laitières poursuivent leur hausse, liée à l’effet saison (peu de vaches sont réformées en début d’été afin de profiter de la pousse de l’herbe) doublé d’un effet « année » (baisse prononcée des abattages sur un an). La cotation de la vache O a gagné 4 centimes en 4 semaines, à 4,73 €/kg en semaine 28 (-2% /2023) et celle de la vache P 2 centimes, à 4,42 €/kg (-3% /2023). Les cours pourraient ainsi retrouver prochainement leur niveau de 2023.

Les cours des jeunes bovins ont repris leur baisse saisonnière

Après avoir regagné quelques centimes entre fin mai et fin juin, les cotations de jeunes bovins de type viande sont reparties à la baisse, très légèrement au-dessus de leur cours de 2023. Ils restent très en-dessous des cotations italiennes qui se sont globalement mieux maintenues en début d’année.

Les cotations des JB U et R ont perdu 2 centimes en 4 semaines pour tomber à 5,32 €/kg de carcasse en semaine 28 pour le JB U (+1% /2023) et 5,18 €/kg pour le JB R (1% /2023). La cotation du JB O est restée stable à 4,77 €/kg (-2% /2023).

L’IPAMPA en légère baisse

En mai, l’IPAMPA viande bovine (indice des prix d’achat des moyens de production agricoles, base 100 en 2015) s’est réduit de -0,8% par rapport à avril pour s’établir à 130,3. Il était en baisse par rapport aux deux années précédentes (-2,8% /2023 et -3,7% /2022), mais restait plus élevé qu’avant le déclenchement de la guerre en Ukraine (+18% /mai 2021). L’indice des aliments achetés a poursuivi sa décrue (-1% /avril, -11% /mai 2023 et mai 2022), ce qui peut expliquer la meilleure finition des gros bovins.

À noter que l’IPAMPA ne couvre toutefois pas l’ensemble des charges des exploitations : d’autres charges comme les coûts salariaux ou les coûts des travaux par tiers, qui ne sont pas prises en compte dans l’IPAMPA, restent en hausse par rapport à 2023.

Abattages : des poids carcasse en hausse pour toutes les catégories

Sur les semaines 25 à 28, les effectifs de vaches abattues dans les abattoirs de plus de 1 500 tonnes/an étaient en baisse de -6,0% /2023 pour les vaches laitières et -2,5% pour les vaches de type viande. Ce recul des réformes de vaches est imputable au repli durable des cheptels, à la baisse des entrées de génisses, aux conditions fourragères favorables et pour les vaches laitières à un prix du lait qui reste incitatif. La hausse des poids moyens de carcasse, liée aux bonnes conditions fourragères, ne compensait qu’une partie de la baisse des effectifs abattus : les tonnages produits sur les semaines 25 à 28 ont reculé de seulement -4,5% pour les vaches laitières et -2,2% pour les vaches de type viande.

Les abattages de génisses de type viande ou croisées étaient en revanche en hausse, de +2,7% en tête et +3% en tonnage, de même que ceux de jeunes bovins de type viande et croisés viande, à +8,7% /2023 en tête et +10% en tonnage, et ceux de jeunes bovins laitiers, à +1,1% en tête et +2,9% en tonnage. La baisse du prix de l’aliment a permis de mieux finir les animaux, d’où la hausse des poids moyens.

Au total, le nombre de gros bovins abattus était quasiment stable par rapport à 2023 sur les semaines 25 à 28 (-0,4% /2023) et les volumes produits en légère hausse (+1,2%).

La décapitalisation encore et toujours

En 8 ans, la France a perdu 1 million de vaches, dont 608 000 vaches allaitantes et 401 000 vaches laitières. Ce million perdu entre le 1er juin 2016 et le 1er juin 2024 représente une baisse de cheptel de 13%.

Au 1er juin, le nombre de vaches allaitantes présentes en France était tombé à 3,468 millions de têtes, soit -1,8% /2023, la même baisse qu’un mois plus tôt. Le recul était de -3,0% au 1er juin 2023/2022. La décapitalisation a donc ralenti en un an mais son rythme reste non négligeable.

Le nombre de vaches laitières était quant à lui de 3,309 millions, en recul de -1,7% au 1er juin, contre -1,5% /2023 au 1er mai. Pour mémoire, il était de -2,4% au 1er juin 2023 /2022.

Des difficultés à valoriser la bonne pousse de l’herbe

Le printemps maussade n’a pas facilité la gestion de l’herbe. Les sorties des animaux ont été retardées, de même que la récolte d’herbe car les prairies n’étaient pas praticables. Ainsi, malgré de bons rendements, la qualité n’est pas au rendez-vous car les retards de fauche ou de pâture ont amené l’herbe à un stade végétatif avancé ce qui la rend moins digeste. La note agroclimatique et prairies de l’Institut de l’Élevage de juillet fait le point région par région.
D’après la note d’Agreste sur les rendements des prairies permanentes (indicateur ISOP), la pousse cumulée en France métropolitaine au 20 juin 2024, était supérieure de 18 % à la moyenne observée sur la période de référence 1989-2018. « Les températures excédentaires du début de campagne suivies de températures proches des normales, accompagnées de pluies fréquentes et généralisées à l’ensemble du territoire, ont favorisé une production d’herbe qui atteint des niveaux inédits sur les 30 dernières années. » Toutefois, cette note ne tient pas compte de la qualité de l’herbe récoltée ou pâturée.