Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 364 Septembre 2024 Mise en ligne le 16/09/2024

Les prix des ingrédients laitiers ont continué d’augmenter sur les dernières semaines. Les cours de la poudre de lait écrémé atteignent les 4 340 €/t en semaine 14 soit une hausse de +74% par rapport à l’an dernier. En beurre, la cotation ATLA sur le marché spot s’affiche à 7 340 €/t la même semaine et dépasse désormais le prix record de 2017.

Ces hausses de prix s’expliquent par de fortes baisses des disponibilités laitières qui engendrent des concurrences fortes entre les différentes fabrications. Les commandes sont encore supérieures à l’offre à court terme.

A l’approche de Pâques et en période de Ramadan, la demande s’est temporairement repliée. Les acheteurs reviendront-ils au mois de mai ?

Pour le moment, la demande mondiale semble se maintenir, mais le prix à payer pour ces matières importées se renchérit fortement chaque semaine. En effet, les prix des ingrédients augmentent mais à cela s’ajoute des coûts logistiques de plus en plus importants. D’une part, le coût du fret augmente en même temps que celui de l’énergie mais d’autre part, le covid-19 reste un fort facteur de désorganisation logistique.

En Chine, les chaînes d’approvisionnement perturbées

La situation en Chine inquiète tout particulièrement. Alors que les autorités chinoises ont décidé le confinement de la ville de Shanghai afin de respecter la stratégie du zéro covid, l’activité portuaire de ce grand port est perturbée. Les règles sanitaires drastiques sur les camions entrainent une pénurie de chauffeurs routiers qui n’assurent plus les liaisons vers le port ou pour sortir les marchandises. Les importations de produits laitiers s’en trouveront forcément ralenties dans les semaines à venir, surtout que les exportateurs se montreront prudents vis-à-vis de l’augmentation des temps de transport dans le cas de produits périssables. Par ailleurs, les habitants de plus d’une vingtaine de grandes villes sont concernés par des confinements plus ou moins importants qui ne leur permettent pas d’aller s’approvisionner régulièrement. Les produits laitiers seront également impactés car dans l’impossibilité d’être consommés.

Enfin, alors que les chaînes logistiques dans le pays sont perturbées, certains transformateurs chinois doivent fabriquer davantage de poudres de lait à partir du lait cru, limitant également les besoins en produits importés.

Fromages : privilégiés aux Etats-Unis

Aux Etats-Unis, La progression des fabrications de fromages est particulièrement forte en ce début d’année 2022 (+6% au mois de février vs 2021, soit +30 000 t) et répartie de façon globalement homogène sur tout le territoire. La production de mozzarella semble privilégiée (+5% sur la période janv-février vs 2021).

La demande en fromages semble toujours plus conséquente. Les exportations états-uniennes sont dynamiques sur les deux premiers mois de l’année (+12% vs 2021, soit + 7 000 t avec notamment une forte hausse de la demande mexicaine), de même que la consommation intérieure.

Toutefois, les fabrications de fromages nécessitent de la main d’œuvre qui parfois vient à manquer dans certaines fromageries quand le covid-19 touche les salariés, ce qui semble inciter certains opérateurs à se tourner vers d’autres fabrications quand cela est possible.

Le lactosérum ne semble pas bénéficier d’une demande aussi forte, notamment à l’export : sur janvier et février les expéditions états-uniennes ont baissé de -10% /2021. La Chine a d’ailleurs réduit de près de moitié ses importations sur les deux premiers mois de l’année. Les Etats-Unis ont réagi notamment en se concentrant sur les spécialités de lactosérum plus concentrés en protéine. Les fabrications de WPC ont augmenté de +16% à 43 000 t sur les deux premiers mois de l’année. Ce concentré protéique de lactosérum est utilisé par les industries agroalimentaires pour sa forte teneur en protéine qui peut remplacer les œufs par exemple ou venir enrichir des aliments « santé » (barres énergétiques, boissons pour les sportifs…).

Poudres de lait : faibles fabrications

Dans l’UE-27, la demande intérieure en poudres de lait peine à être satisfaite. Les fabrications sont réduites d’une part, toujours en raison de la baisse de collecte en Europe, mais aussi d’autre part en raison des coûts de séchage. Ils subissent la hausse des prix du gaz et les problèmes géopolitiques inhérents, ce qui diminuent les marges des transformateurs malgré la hausse des prix.

Les fabrications européennes au mois de janvier ont baissé de -10% /2021 avec notamment -24% en Allemagne et -13% aux Pays Bas. Les fabrications français étaient stables en janvier, mais ont chuté au mois de février.

Sur le marché international, la demande mexicaine et chinoise en poudres de lait recule, ce qui est en partie compensé par des achats plus conséquents de l’Indonésie et de la Malaisie notamment.

Matières grasses : Forte tension

Le marché européen de la matière grasse est particulièrement tendu faute de disponibilités suffisantes qui ne permettent pas la constitution de stocks saisonniers. Le cours du beurre sur le marché spot en France afranchi la barre des 7 000 €/t fin mars, à 7 340 €/t en semaine 14, soit un niveau supérieur à celui atteint en 2017, précédent record.

La demande en crème comme en beurre est actuellement très forte. Les acheteurs cherchent à couvrir leurs besoins en crème pour préparer les glaces de cet été.

Certains acheteurs ont pensé que le pic laitier apporterait une hausse de disponibilité, qui ne semble toujours pas présente, rendant ces derniers nerveux.

Sur les volumes non encore contractualisés à ce jour, les transformateurs privilégieront la fabrication de crème à celle du beurre car celle-ci permet aujourd’hui des marges plus importantes.

En conclusion, la demande mondiale risque de marquer le pas face à la forte hausse des prix mondiaux même si cela peut prendre plusieurs mois avant de se voir notamment pour les poudres. En revanche, pour les matières grasses ou les fromages, le prix maximum n’est peut-être pas encore atteint. Au niveau intérieur en France, l’inflation ne s’est que partiellement répercutée sur les prix à la consommation des produits laitiers. Pourtant, la consommation décroît déjà pour certains produits comme le lait de consommation et les ultra-frais, sous l’effet de changements de comportement des ménages.