Les prix des vaches de réforme en Europe ont poursuivi leur redressement en janvier, à des degrés divers. La demande reste ferme pour la transformation et pour le haché alors que l’offre est parfois limitée. La demande britannique est particulièrement dynamique, soutenant les exportations irlandaises.
ALLEMAGNE : l’offre de réformes insuffisante pour répondre à la demande
En Allemagne, la fermeture de la restauration et la moindre sortie des touristes allemands du territoire ont entraîné un report de la consommation de viande vers les achats au détail. Les ventes de viandes, de saucisses et de volaille ont nettement progressé l’an passé (+8% /2019 en volume). C’est particulièrement le cas pour la viande bovine (+19%), malgré un prix moyen en hausse (+4,3%).
Ce report de la consommation aurait permis à la consommation calculée par bilan de progresser légèrement de +0,2% en 2020 d’après nos estimations. Et d’après AMI, les achats au détail seraient restés dynamiques en janvier et en février 2021, particulièrement pour la viande de réforme utilisée pour la transformation dont la demande est traditionnellement très dynamique après les fêtes de fin d’année. La hausse de la demande en pièce à griller, plus favorable à la viande de jeune bovin, n’est pas attendue avant la fin du mois de mars.
Malgré la demande soutenue des abattoirs en vaches de réforme, l’offre reste limitée. Elle l’avait été tout au long de 2020, perturbée par la pandémie de Covid-19. Les abattages de réformes étaient ainsi en net retrait (-9% /2019).
En ce début d’année, sur les 4 premières semaines de 2021, les abattages de réformes restent contraints mais en léger rebond par rapport au très faible niveau de 2020 (+1% /2020). Début février, les intempéries liées aux chutes de neiges limitaient les envois d’animaux vers les abattoirs.
Dans cette configuration d’offre inférieure à la demande, la cotation de la vache O a poursuivi sa lente progression. Depuis le début 2021, la cotation a repris 7 centimes par rapport à la dernière cotation de 2020, pour atteindre 2,65 €/kg de carcasse en semaine 4. Ce niveau reste cependant inférieur à ceux des années précédentes (-4% /2020 et 1% /2019). L’écart avec la cotation du porc, affectée par la progression de l’épizootie de FPA dans le pays et la perte du débouché chinois, ne cesse ainsi de croître. Il est passé de 1,35 €/kg éc fin 2020 à 1,42 €/kg éc en semaine 4. Ce différentiel ne pèse pourtant pas sur le penchant actuel des abatteurs pour la viande de vache de réforme.
A noter que depuis le 1er janvier 2021, suite à la mise en lumière des conditions de vie insalubre de nombreux travailleurs détachés employés en abattoir, une nouvelle « Loi concernant les conditions de travail dans l’industrie de la viande en Allemagne » est entrée en vigueur. Elle prévoit que :
- la sous-traitance dans le secteur de la viande est interdite à partir du 1er janvier 2021 ;
- les entreprises peuvent employer des travailleurs temporaires jusqu’à un maximum de 8% des effectifs, pour autant que cela soit réglementé par une convention collective ;
- à compter du 1er avril 2021, la durée maximale pendant laquelle un travailleur temporaire peut être salarié est de 4 mois ;
- les employés temporaires et permanents doivent recevoir un salaire égal et un traitement égal ;
- le temps de travail doit être dûment enregistré informatiquement. Le montant des amendes pour fraude sur le temps de travail est doublé et fixé à 30 000 € par délit constaté ;
- des normes minimales sont fixées pour l’hébergement des travailleurs.
Ces nouvelles dispositions pourraient mettre fin à une distorsion de concurrence intra-communautaire, notamment dénoncée par les industriels français du secteur depuis plusieurs années.
Irlande : les cours poursuivent leur rattrapage
En Irlande, le marché de la viande bovine est resté dynamique en janvier. La demande en vaches de réforme pour l’export notamment vers le secteur de la transformation a continué à soutenir les cours. En semaine 4, la cotation de la vache O s’établissait à 3,05 €/kg de carcasse (+8% /2020 et +13% /2019), soit une hausse de 10 centimes par rapport à la dernière cotation de 2020 (+3%).
La hausse de prix de janvier n’a pas concerné que la seule catégorie des réformes. D’après Bord Bia, la demande en animaux plus jeunes reste soutenue par le secteur de la vente au détail, en Irlande mais surtout au Royaume-Uni, premier consommateur de viande bovine irlandaise. Depuis le début de l’année, la génisse R s’est appréciée de 7 centimes (+2%) à 3,89 /kg éc (+5% /2020) et le bœuf R a repris 6 centimes à 3,83 /kg éc (+5% /2020).
En face, l’offre demeure plutôt limitée, sauf pour les réformes. Les abattages de gros bovins ont été en retrait sur les 4 semaines de janvier (-4% /2020 en cumul) d’après l’indicateur hebdomadaire du Ministère de l’agriculture irlandais. La production de JB a notamment poursuivi son recul sur un rythme similaire à celui de l’année passée. Les abattages de réformes ont été plutôt dynamiques (+7% /2020).
Le mois de janvier est habituellement un bon mois pour la transformation et la viande de réforme. En effet, après les fêtes de fin d’année, les ménages favorisent notamment la viande hachée au détriment des découpes, pour des questions de pouvoir d’achat. Malgré la pandémie et les restrictions autour de la restauration, il semble que cela se soit confirmé en 2021. Les dernières remontées font cependant état d’une amorce de baisse des cours qui reste néanmoins à confirmer.
En fin d’année, d’après Bord Bia, les exportations irlandaises de viande bovine réfrigérée et congelée avaient poursuivi leur redressement, notamment vers le Royaume-Uni. En novembre 2020, les exportations ont atteint 51 900 téc (+6% /2019). Vers le seul Royaume-Uni, elles ont encore davantage rebondi en novembre (+23% /2019 à 27 200 téc). En cumul sur les 11 premiers mois de l’année, l’écart avec 2019 s’était ainsi réduit (-1% /2019 et +4% /2018).
Royaume-Uni : soutenues par des ventes au détail dynamiques, les cotations toujours au plus haut
Au Royaume-Uni, malgré les restrictions affectant le secteur de la restauration, la consommation de viande bovine est restée dynamique depuis le début de l’année. Le report vers les ventes au détail, soutenu par le maintien d’un bon nombre de voyageurs britanniques sur le territoire national, fait mieux que compenser en volume la perte de débouchés hors domicile.
En fin d’année 2020, les restrictions en lien avec la pandémie avaient pesé en faveur de la consommation de viande bovine lors des fêtes de Noël. Avec moins d’invités, les consommateurs ont rompu avec les traditions, notamment concernant la consommation de volaille (dinde,…). D’après Kantar, sur les 4 semaines finissant le 27 décembre 2020, les ventes de viande bovine ont progressé de +18% /2019. La part de marché de la viande bovine est ainsi passée à 15% des découpes de viande (contre 13% les trois années précédentes). Les boucheries en ont particulièrement profité. Les bouchers ont ainsi connu leur meilleur Noël de l’histoire récente : les ventes de viande rouge et de volaille ont progressé en valeur de +16% /2019 (Kantar sur 4 semaines finissant le 27 décembre 2020). Sur l’année 2020, les ventes de viandes en boucherie ont d’ailleurs été portées par les effets de la pandémie : +22% /2019 et +550 000 « actes d’achats ».
La progression de la demande concerne tous les morceaux, y compris le haché. Les cours ont donc été soutenus en fin d’année. Ils l’ont encore été en début d’année, y compris pour les réformes. Fin janvier, la cotation de la vache O s’établissait à 2,64 £/kg de carcasse (+8% /2020 et = /2019), soit 2,98 €/kg de carcasse en semaine 4.
Même constat pour le bœuf R britannique qui cotait 3,84 £/kg de carcasse (+13% /2020 et +4% /2019). A 4,33 €/kg, il s’est apprécié de 16 centimes par rapport à la dernière cotation de 2020. Malgré la progression des cours en Irlande, l’écart avec la cotation du bœuf irlandais est reparti à la hausse (50 centimes/kg en semaine 4 de 2021 contre 38 centimes un mois plus tôt).
Les abattages de gros bovins ont été dynamiques sur les quatre premières semaines de 2021 (+11% /2020). Toutes les catégories sont à la hausse, notamment pour les réformes dont les abattages sont en très nette hausse (+18%).
En novembre 2020, les importations britanniques s’étaient légèrement redressées (+1% /2019) notamment depuis l’Irlande, mais aussi depuis l’Allemagne, l’Autriche et l’Espagne. En cumul de janvier à novembre, le Royaume-Uni avait importé 219 400 tonnes de viande bovine réfrigérée et congelée (-3% /2019). Les exportations avaient poursuivi leur chute en novembre à 9 300 tonnes (-28% /2019). Sur 11 mois, la baisse avait atteint -16% à 105 700 tonnes. Cependant, les exportations à destination des pays tiers (hors UE) poursuivaient leur progression : +16% par rapport à une année 2019 déjà en forte hausse.
Avec la baisse des effectifs observés dans la dernière enquête cheptel, AHDB prévoit en 2021 une baisse de -5% /2020 de la production britannique de viande bovine. L’institut anglo-gallois table sur une hausse des importations (+4% /2020) liée à une amélioration de la situation de la restauration. Les exportations devraient reculer (-3% /2020), essentiellement du fait du repli de la production domestique. La consommation par bilan pourrait ainsi diminuer sensiblement (-3% /2020), en raison d’une baisse des ventes au détail après une année 2020 exceptionnelle…
POLOGNE : les cours se redressent légèrement
En Pologne, les cours des réformes ont entamé une timide remontée après le nouveau reflux observé fin décembre en lien avec la baisse de la demande en viande polonaise pour la transformation. La cotation de la vache O s’est appréciée de +9 centimes par rapport à la dernière cotation de 2020. Elle atteignait le faible niveau de 2,50 €/kg de carcasse (-2% /2020 et -7% /2019) en semaine 4. C’est 54 centimes de moins qu’en Irlande, 52 centimes de moins qu’en France et 21 centimes de moins qu’en Allemagne.
Avec la baisse du zloty observée depuis plusieurs mois, la viande polonaise a encore amélioré sa compétitivité sur le marché de l’export. Ainsi, l’origine Pologne est la seule à avoir été en hausse dans les importations françaises de viande bovine en décembre 2020 /2019.