Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 360 Avril 2024

La collecte laitière française a été impactée par des fourrages 2022 peu lactogènes et un mois de septembre exceptionnellement caniculaire. La fin d’année s’avère plus propice à la production laitière.

Le prix du lait en France a plutôt bien résisté mais va sensiblement baisser au dernier trimestre. Les fabrications sont plutôt dynamiques pour répondre à des exportations en progression et une consommation qui a fait preuve de résilience même si elle affiche un repli marqué en août.

Chute de collecte en septembre

La collecte laitière française a poursuivi sa tendance baissière en août (-1,9% /2022). Sur les 8 premiers mois de l’année, la baisse a atteint -2,3% /2022. Malgré ce déclin préoccupant, la nette amélioration des taux a permis d’atténuer sensiblement le repli de la collecte : -0,7% /2022 en MSU. Le mois de septembre a été particulièrement éprouvant avec une chute brutale de la collecte (-4,9% / 2022), d’après nos estimations calculées à partir des sondages hebdomadaires de FranceAgriMer. Les conditions climatiques caniculaires ont été très préjudiciables à la productivité des vaches, notamment celles en début de lactation, plus sensibles aux fortes chaleurs. En outre, l’herbe ensilée au printemps a des teneurs en matière azotée et énergie plutôt faibles. Ainsi, le reflux a été très important en septembre en Bretagne (autour de 6% de baisse) et en Pays de la Loire (environ 5% de baisse). Sur 8 mois, la collecte reste positive pour la Normandie et les Hauts de France, mais ces deux régions n’ont pas été exemptes des effets de l’épisode caniculaire de septembre (2 à 3% de repli sur ce mois).

Au 1er septembre 2023, l’effectif de vaches laitières a enregistré une baisse (-2% /2022) moins prononcée que les mois précédents :  une très forte diminution des sorties de vaches de réforme est observée (-17% en septembre /2022) probablement en lien avec un net recul du nombre d’entrée de génisses (-10% /2022). Les éleveurs gardent davantage leurs vaches : la bonne tenue du prix du lait, mais aussi la très bonne quantité et qualité des maïs récoltés en 2023 (avec une très bonne teneur en amidon) les inciteraient à produire du lait. D’autant que les laiteries montrent une flexibilité inédite quant aux volumes produits, allant jusqu’à accorder des références supplémentaires aux éleveurs.

A l’approche de la fin d’année, les perspectives de collecte laitière apparaissent plus favorables, avec des fourrages plus lactogènes. Ces améliorations ne devraient toutefois pas être suffisantes pour inverser le bilan annuel de collecte qui restera en deçà de l’année dernière. D’après nos estimations, la collecte annuelle reculerait de -2% /2022.

Un prix du lait stable mais un recul annoncé au dernier trimestre

En août 2023, le prix du lait standard (toutes qualité) en France a atteint 460 €/1 000 l, en progression de +2 € en un mois. Il reste toujours plus élevé qu’un an auparavant (+5 € /2022). Une relative stabilité des prix se profile dans l’UE. Probablement stable en septembre, le prix français se tasserait au dernier trimestre. D’après nos estimations, il reculerait d’environ 10 €/1 000 l en octobre.

Quid du prix du lait début 2024 ? De fortes inquiétudes planent sur la baisse du prix du lait. Dans un climat de tension sur la ressource laitière, de fort enjeu démographique, d’une motivation fragile chez les éleveurs, il ne faudrait pas que le prix du lait descende en dessous de la barre des 400 €/1 000 l.

Après 6 mois de baisse, les charges repartent légèrement à la hausse en août (+0,7% /juillet 2023) d’après l’IPAMPA lait de vache. Malgré un recul des charges alimentaires, le poste énergie a fortement augmenté (+9% en un mois). A noter que sur un an, l’IPAMPA reste toutefois en recul (-2,4% /aout 2022).

La marge MILC, estimée à 146 €/1 000 l en août, a augmenté de +1 € d’un mois sur l’autre sous l’effet de la hausse du prix du lait. Le produit des ventes d’animaux a légèrement fléchi. Sur un an, la MILC a augmenté de +21 €/1 000 l. Le produit lait a progressé (+15 € /2022) alors que les autres produits se sont réduits (-4 €), mais les charges ont reculé (-10 €).

Des fabrications particulièrement dynamiques

En août 2023, les produits laitiers ont enregistré une croissance significative de leurs fabrications par rapport à août 2022.  De meilleures ventes en magasins ces derniers mois ont stimulé les fabrications. En cumul sur 8 mois, les fabrications sont en forte hausse pour les poudres de lait infantile (+6% /2022) et les crèmes conditionnées (+5%). Ces deux produits ont connu une hausse de leurs exportations et les ventes de crème en magasins ont repris une dynamique positive. Les fabrications de laits conditionnés ont progressé de +1% et celles de yaourts, beurre et fromages sont restées stables. En revanche, les fabrications de poudres de lait écrémé et entier ont baissé respectivement de -5% et -3% /2022.

Les ventes en magasins amorcent un recul

Sur la période 9 de 2023, qui correspond surtout au mois d’août, les ventes en magasins de produits laitiers sont reparties à la baisse. Le recul des ventes est particulièrement marqué pour les laits conditionnés (-5% /2022) et les desserts lactés frais (-8%). Les ventes de beurre ont décliné de -4% et celles de crème et de fromages frais de -2%. Seules les ventes de fromages et de yaourts restent positives en volume. Ce fléchissement des ventes de produits laitiers en magasins rompt avec la dynamique positive observée ces derniers mois. Pourtant, les prix à la consommation ont montré des signes de stabilisation dans les linéaires depuis quelques semaines.

Amélioration du solde commercial, mais dégradation en fromages

En cumul jusqu’à août, les exportations de produits laitiers ont progressé en tonnes de MSU (+1,1% /2022 selon FranceAgriMer). Dans le détail, les exportations de crèmes (+32%), de yaourts (+11%), de poudre maigre (+11%) et de poudre de laits infantiles ont été dynamiques. En revanche, celles de laits conditionnés ont fortement reculé (-37%). Les exportations de fromages poursuivent leur repli.

Les importations se sont repliées dans le même temps de -3,8% /2022 (tonnes de MSU). La baisse des importations a concerné principalement les poudres de lait infantile (-5% /2022), la poudre maigre (-5%) et le lactosérum (-20%). Les importations de beurre ont progressé de +6% et celles de fromages de +3%. Les importations d’emmental ont connu une croissance impressionnante de +26%, particulièrement en provenance d’Allemagne et des Pays Bas. Les importations de cheddar ont également progressé (+8% /2022) en provenance du Royaume Uni, mais surtout des Pays Bas. Et les imports de féta ont explosé (+27% /2022) avec une forte progression d’Allemagne.

Le solde commercial, de près de +2 milliards d’€ cumulé à août, a progressé de +10% /2022. Il convient de noter toutefois un recul marqué de l’excédent commercial en fromages (-10%).