Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 360 Avril 2024

La collecte européenne s’est redressée au deuxième semestre 2022. Elle a progressé en novembre de +1,8% /2021. Les prix du lait sont incitatifs à la production laitière en Europe du Nord. Par ailleurs, cette reprise est également permise par un climat doux à l’automne et un hiver peu rigoureux.

Fort rebond en Allemagne de +3% en fin d’année

En Allemagne, la collecte au 1er semestre est ressortie en baisse de -1,4 % /2021. Toutefois, avec la hausse des prix du lait payé aux éleveurs, la production est redevenue incitative. Sur le dernier trimestre 2022, la collecte est estimée en hausse de +3 % /2021, les volumes reviennent donc sur les niveaux de 2020. Cette hausse est permise par un cheptel de vaches laitières plutôt étoffé. Il a très peu baissé entre décembre 2021 et décembre 2022. Face à l’envolée du prix du lait, les éleveurs ont limité au strict nécessaire les réformes (-10% sur janv-oct /2021).

Le rebond de la collecte automnale a engendré des hausses de fabrications de poudre maigre et de beurre (respectivement +27% et +5% /2021 en novembre) dans un contexte de moindre consommation et de tassement des exports. Le stockage engendré de ces ingrédients laitiers serait un facteur explicatif de la baisse des prix de ces derniers sur la fin d’année 2022.

Retour de la production sur les niveaux historiques aux Pays-Bas

Aux Pays-Bas, comme en Allemagne, les prix élevés du lait ont relancé la production laitière qui est remontée aux niveaux de 2019 et 2020. La croissance de la production laitière s’est accélérée fin 2022 pour atteindre en novembre +5 % /2021.

Comme en Allemagne, les producteurs ont gardé le maximum de vaches, si bien que les abattages de réformes ont baissé sur dix mois, de -7 % /2021, avec notamment un fort recul en juin et juillet. Ce repli a coïncidé avec la reprise de la production laitière.

La dynamique en Pologne se maintient

La collecte polonaise s’est montrée plus régulière sur l’année 2022. Elle finit au dernier trimestre en hausse de +2,5% /2021 alors qu’il s’agissait d’un des rares pays à ne pas avoir décroché en fin d’année 2021.

Le conflit ukrainien a entrainé une vague d’immigration de réfugiés importante en Pologne qui ont trouvé du travail notamment dans la filière laitière. Les laiteries ont donc eu moins de problèmes de disponibilité de main d’œuvre que d’autres pays européens. Dans le même temps, cet afflux de population (estimé à près d’un million) a stimulé la consommation intérieure, notamment de produits laitiers. La collecte supplémentaire de lait a ainsi surtout été transformé en produits de grande consommation comme les laits conditionnés (+1% /2021 sur onze mois), les yaourts (+5%) ou le beurre (+5%). Les fabrications de poudres de lait ont en revanche peu évolué.

Du côté des échanges, les exports de matières grasses ont bondi : +58% sur janv-oct /2021 en beurre et +13% en crème principalement pour de l’intracommunautaire. Les exports de poudre maigre ont chuté vers les pays tiers (Algérie, Philippines et Chine) au profit de l’intracommunautaire également.

Baisse de la collecte au sud de l’UE-27

Si en 2021, le dynamisme de la production venait de l’Espagne et de l’Italie, en 2022, la tendance s’est inversée. L’Europe du Sud a beaucoup pâti des conditions sèches et chaudes de l’été dernier. Ainsi, la collecte italienne a reculé de -3 % /2021 en novembre et de -1% sur 11 mois. En Espagne, la chute est plus prononcée de -3,6 % /2021 sur les mois d’août à octobre et de -2,2% sur 10 mois.

Quelles perspectives pour le 1er semestre 2023 ?

Les prix du lait records sur la fin d’année 2022 risquent de ne plus être d’actualité assez rapidement au vu de la dépréciation rapide des cours des ingrédients laitiers. Après être passés fin 2022 sous les niveaux de 2021 à pareille époque, le prix beurre s’affichait à 5 290 €/t et celui de la poudre maigre à 2 810 €/t en première semaine de 2023 selon ATLA. Cette chute des prix des ingrédients laitiers est notamment liée à la hausse de collecte dans un contexte de demande tant intérieure qu’internationale en repli.

La valorisation du lait transformé en beurre/poudre maigre est tombé à 411 €/1 000 l sur le marché international et 465 €/1 000l sur le marché européen en décembre. Pour le moment les laiteries nord-européennes n’ont pas encore annoncé de baisse de prix du lait, même si cela semble inéluctable. Elles s’attendent mutuellement pour savoir qui prendra l’initiative. Quoiqu’il en soit les révisions de prix risquent d’être brutales, notamment en Allemagne où le prix du lait est très réactif au marché des commodités laitières. Il pourrait tomber à 450 €/1 000 l dès mars selon certains observateurs. La question suivante est de savoir quelle sera la réaction des éleveurs, dans un contexte de coûts de production et de prix de la viande encore élevés. Vont-ils lever le pied voire réformer ? Auquel cas les abattages pourraient reprendre en Europe du Nord à la fin du pic laitier.