Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 360 Avril 2024

Les cheptels ont été considérablement réduits depuis le printemps avec très peu de primipares ayant intégré les troupeaux. Les abattages de femelles allaitantes sont en retrait. Les producteurs laitiers retiennent de nouveau leurs vaches pour profiter d’un prix du lait qui redevient stimulant. Les jeunes bovins sont eux aussi peu nombreux et très convoités. Les prix restent bien orientés.

La décapitalisation allaitante s’accélère

Au 1er octobre, le nombre de vaches allaitantes présentes en France était en recul de -3,2% /2021, contre 3,1 % au 1er septembre. La baisse s’est accentuée depuis le début de l’année, elle n’était que de -2,7% au 1er janvier. C’est le résultat d’un recul notable des entrées de primipares dans les troupeaux (-4,3% sur les 12 mois glissants par rapport aux 12 mois précédents) alors que les sorties étaient quasiment stables (-0,6% sur 12 mois glissants).

Jusqu’à présent, les abattages participaient à la baisse de cheptel. Il semble désormais que le recul du cheptel se fasse sentir sur les abattages. D’après l’indicateur hebdomadaire de Normabev sur les 5 semaines 41 à 45, le nombre de vaches de type viande abattues était en repli de -5% /2021 et ceux de génisses de type viande de -4%.

Moins de vaches laitières

Au 1er octobre, le nombre de vaches laitières présentes en France était en repli de -2,4% /2021, la baisse s’est donc considérablement accentuée depuis le 1er juin (-1,3% /2021), les éleveurs ayant ajusté leur cheptel pour s’adapter au manque d’herbe induit par la canicule et la sécheresse. Cette réduction de cheptel n’a pas conduit à un afflux massif dans les abattoirs car elle résulte avant tout d’une très forte baisse des entrées de primipares dans les troupeaux (-9% /2021 sur les 4 mois de juin à septembre), les sorties n’étant en hausse que de +1% /2021 sur ces mêmes 4 mois.

Sur les 5 semaines 41 à 45, le nombre de vaches laitières abattues était en baisse de -8% /2021. Il semble qu’il y ait un frémissement de reprise du côté de la production laitière, avec un prix du lait suffisamment stimulant pour inciter les éleveurs à retenir de nouveau leurs vaches (lire l’article sur la production laitière).

Cotations des vaches allaitantes en hausse

L’offre restreinte soutient les prix. La vache U standard cotait 5,74 €/kg de carcasse en semaine 45, soit 20 centimes de plus qu’en semaine 30. Elle se situait par ailleurs bien au-dessus (+18%) de la cotation 2021 qui incluait alors les SIQO (Label rouge principalement).
Depuis juillet, FranceAgriMer publie des cotations SIQO sur un pas de temps mensuel. Celle de la vache de type viande, tous poids toutes races, de conformation U= était à 5,86 €/kg de carcasse en septembre, contre 5,77 €/kg lors de la première publication en juillet. Toutes les cotations sont à retrouver sur le site Visionet de FranceAgriMer.

La cotation de la vache R, à 5,39 €/kg de carcasse en semaine 45 (+26% /2021), avait gagné 10 centimes depuis la semaine 30.

Érosion saisonnière des cotations des laitières

Bien que l’offre soit particulièrement restreinte, les prix des réformes laitières françaises semblent avoir suivi avec retard le mouvement saisonnier à la baisse enregistré dans les autres États membres. L’érosion reste toutefois mesurée. La vache O a perdu 7 centimes en 4 semaines pour coter 4,99 €:kg en semaine 45 (+38% /2021). La vache P a perdu 10 centimes en 4 semaines, à 4,83 €/kg (+41% /2021).

Des jeunes bovins très recherchés

Avec la baisse globale des disponibilités en femelles, les jeunes bovins sont activement recherchés par les abatteurs afin de faire tourner leurs outils, ce qui soutient les cours. Le marché européen est par ailleurs bien orienté (voir article JB Europe). Les prix français suivent donc la tendance à la hausse enregistrée chez nos voisins et notamment en Italie.
La cotation du JB U a gagné 5 centimes en 4 semaines pour grimper à 5,36 €/kg de carcasse en semaine 45 (+21% /2021). Celle du JB R a gagné 6 centimes sur la même période, à 5,26 €/kg (+23% /2021) et celle du JB O +1 centime à 5,01 €/kg (+38% /2021).

Le nombre de jeunes bovins abattus sur les 5 semaines 41 à 45 était en légère hausse par rapport au très bas niveau de 2021 d’après l’indicateur hebdomadaire de Normabev, mais en recul de -11% /2020 ! Ceux de JB de type viande étaient à un niveau intermédiaire entre les deux années précédentes (+3% /2021 et -5% /2020) et ceux de JB de type lait étaient en forte baisse (-6% / 2021 et -29% /2020, année perturbée par le 1er confinement).

Des charges en très forte hausse sur un an

Les évolutions des prix des animaux finis sont à mettre en regard de leurs prix de revient qui a considérablement augmenté du fait de la flambée des matières premières. L’Institut de l’Élevage calcule pour l’Interprofession bovine un prix de revient sur une base semestrielle pour chaque catégorie de bovin. Au premier semestre 2022, il était de 5,82 €/kg pour la vache de type viande (+72 centimes pour les animaux label rouge) et de 5,64 €/kg pour les jeunes bovins de type viande. Ces prix de revient seront sans doute encore plus élevés au second semestre étant donnée l’évolution des prix des intrants.
En septembre 2022, l’IPAMPA viande bovine (indice des prix d’achat des moyens de production agricole, base 100 en 2015) s’établissait à 137,2 points, en très léger recul par rapport à juin grâce à une accalmie momentanée de la hausse du prix des carburants, en très forte hausse par ailleurs depuis 2 ans (+20% /2021 et +32% /2020). L’indice des prix des aliments achetés était en hausse de +28% /2021 et +43% /2020, celui des énergies et lubrifiants de +34% /2021 et +84% /2020 et celui des engrais et amendements de +79% /2021 et +153% /2020.

Productivité des prairies : la situation favorable de l’automne ne compense pas les pertes subies pendant l’été

D’après l’indicateur ISOP d’Agreste, la production cumulée des prairies permanentes depuis le début de l’année jusqu’au 20 octobre était inférieure de -29% à celle de la période de référence 1989-2018. La sécheresse extrême et les vagues de chaleur exceptionnelles enregistrées à partir de mai ont en effet fortement réduit la pousse de l’herbe pendant l’été. Les précipitations de l’automne associées à des températures douces ont permis une reprise de la pousse, mais qui est toutefois loin de compenser les pertes de l’été.

Par ailleurs, la situation reste très hétérogène en fonction des régions. D’après la note agro-climatique et prairies de novembre publiée par l’Institut de l’Élevage, le déficit a continué de se creuser en octobre au sud d’une diagonale allant des Pays de la Loire à la Provence. L’Occitanie a vécu un de ses mois d’octobre les moins arrosés et les niveaux d’assèchement des sols sont inquiétants.