Les marchés des produits de l’élevage de ruminants N° 299 Mars 2019

Lait de chèvre et viande

Le cheptel caprin s’étoffe enfin!

Malgré un démarrage laborieux, la hausse du cheptel caprin devrait profiter à la filière caprine et aboutir à la progression des volumes livrés et de la viande produite en 2019. Les efforts de relance de la filière semblent ainsi enfin porter leurs fruits pour répondre à une demande croissante de fromages à l’export.

Des fromages de chèvre toujours plus exportés

Les fabrications de fromages de chèvre ont été relativement molles en 2018. Elles pâtissent d’une consommation morose en France et semblent être toujours davantage orientées vers l’export.

Une légère progression des fabrications de fromages de chèvre en 2018

Des fabrications peu dynamiques

Les fabrications de fromages de chèvre ont atteint un nouveau record en 2018, malgré une croissance plutôt molle. A 101 000 tonnes, elles ont en effet à peine progressé de 700 tonnes d’une année sur l’autre (+0,7% /2017). Elles ont connu une évolution en « dents-de-scie » tout au long de l’année qui n’a pas permis de dégager de véritable tendance. Seulement stables au 1er semestre, elles ont rebondi pendant l’été, avec même une progression de près de 3% au 3ème trimestre. Cette dynamique s’est rompue en fin d’année, avec même une baisse de près de 3% en décembre, en lien avec la baisse de la ressource laitière en France et chez nos voisins européens.

Les débouchés des fromages de chèvre

Près du tiers des fromages de chèvre français est exporté

La publication de nouvelles données issues de l’enquête mensuelle laitière de FranceAgriMer permet de mieux évaluer la ventilation des débouchés pour les fromages de chèvre français. Les achats des ménages sont restés le 1er débouché qui a absorbé 57% des fabrications. Près d’un fromage sur trois a été exporté. La Restauration hors domicile (RHD) a absorbé près de 7% des volumes. Enfin, la consommation intermédiaire par l’Industrie agro-alimentaire (IAA), sous forme par exemple de fromages à pizza, aurait absorbé 3% des volumes.

Les achats des ménages plafonnent…

La « mollesse » des fabrications s’explique grandement par la morosité de la consommation française : le marché est arrivé à maturité et la demande n’évolue qu’au gré de la croissance démographique. Après avoir nettement progressé en 2015 et 2016, récupérant ainsi les volumes de consommation perdus lors de la pénurie de fromages de chèvre connue fin 2013 – début 2014, les ventes de fromages de chèvre en libre-service des GMS se sont stabilisées. Après avoir progressé de 1,5% en 2017, elles ont même plafonné en 2018 (+0,2% /2017), à 49 400 tonnes d’après les données IRI-CNIEL (soit 49% des fabrications nationales).

…mais les exportations de fromages de chèvre progressent

Jusqu’ici, les exportations françaises de fromages de chèvre étaient peu connues et difficiles à suivre, faute de code douanier spécifique. Les dernières estimations dataient d’une enquête réalisée par l’ANICAP en 2011, qui évaluait alors les volumes exportés à près de 19 000 tonnes de fromages de chèvre. Les données de FranceAgriMer, publiées depuis 2016, permettent aujourd’hui d’avoir une estimation des volumes exportés. Ainsi, près de 33 000 tonnes de fromages de chèvre auraient été expédiés en 2018, soit un bond de +24% /2017. Une telle progression (+ 6 400 tonnes) semble excessive au regard de l’évolution des fabrications (+ 700 tonnes). Ces données doivent utilisées avec prudence : elles révèlent une probable sous-estimation des volumes exportés en 2017 qui avaient chuté de 9% /2016. Il n’en reste pas moins que, selon les transformateurs, l’export est devenu un débouché majeur… et plutôt dynamique.

La hausse du cheptel caprin se poursuit

Amorcée en 2017, la progression du cheptel caprin s’est accélérée en 2018. Elle laisse présager une reprise plus dynamique de la production de lait de chèvre en 2019, dont la croissance devrait cependant pâtir de la piètre qualité des fourrages.

Le cheptel de chèvres et de chevrettes a progressé de 2% en 2018

La hausse de cheptel se confirme fin 2018

La baisse du cheptel observée depuis 2010 semble enfin enrayée. Après avoir connu une croissance de 1% fin 2017, timide certes mais encourageante après 6 années de baisse, les effectifs de femelles (chèvres et chevrettes) se sont de nouveau étoffés de 2% en 2018 (+19 000 têtes). L’essentiel de la progression a été guidée par le cheptel de chèvres (+2% /2017), conséquence directe de la rétention d’un nombre important de chevrettes en 2017 (+6% /2016). Les effectifs de ces dernières sont restés stables par rapport au niveau élevé de 2017, à 207 000 têtes, laissant présager la poursuite de la recapitalisation attendue depuis 2014. Comme les années précédentes, l’agrandissement des troupeaux a fortement contribué à cette hausse de cheptel. Mais, fait notable en 2018, le nombre de structures de production semble enfin de nouveau haussière, avec notamment une progression du nombre de livreurs après l’été selon les données de FranceAgriMer. Après plusieurs années marquées par une conjoncture favorable et la mise en place de plans de relance de la filière, les installations semblent avoir enfin repris, au point de compenser les cessations d’activité liées aux départs en retraite.

Évolution régionale contrastée

Entre fin 2017 et fin 2018, le cheptel a évolué de façon disparate selon les régions. En Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie, il aurait progressé de plus de 2,5% d’une année sur l’autre, témoignant ainsi d’une amplification de la reprise. En Auvergne-Rhône-Alpes, la progression a été légèrement plus contenue (+2%), mais constitue une inversion de tendance après le repli observé l’année précédente. En revanche, le cheptel de chèvres aurait baissé dans la plupart des autres régions caprines, avec des chutes allant de près de 9% pour la Bretagne à 1% pour la Bourgogne-Franche-Comté en passant par 2% en Pays de la Loire, 4,5% en Centre-Val-de-Loire et 6% en PACA. Ces baisses de cheptel peuvent parfois être expliquées par la pyramide des âges des éleveurs ou être la conséquence d’évènements climatiques dans certaines régions. Mais elle pourrait également être le résultat d’un réajustement statistique de la part du SSP, notamment en régions Pays de la Loire, Centre et Bretagne qui avaient vu leurs effectifs bondir en 2017.

Une hausse de collecte en perspective

Cette progression du cheptel devrait logiquement annoncer une hausse de la collecte de lait de chèvre en 2019. Néanmoins, son ampleur sera conditionnée par l’évolution des performances zootechniques. Les premières données de collecte annoncent en effet un début d’année compliqué. Selon l’enquête mensuelle laitière de FranceAgriMer, qui portent sur 78% de la collecte, elle serait même en repli de 3% sur au « creux » de janvier. D’un côté, le démarrage des lactations semble pâtir des stocks fourragers de piètre qualité. De l’autre, la cherté de l’alimentation animale a incité certains éleveurs à revoir leurs rations, au détriment des rendements. Cette baisse pourrait également traduire un décalage des naissances qui, s’il est avéré, créerait un déséquilibre entre les 1er  et 2nd semestres.

La production de viande caprine devrait également augmenter

La hausse du cheptel devrait logiquement aboutir à la hausse des disponibilités en animaux à abattre. Sauf en cas de crise sanitaire ou climatique majeure, les sorties d’animaux de réforme ne devraient pas être massives en raison du maintien d’une bonne conjoncture laitière. En revanche, la production de viande de chevreau devrait progresser plus fortement : à la hausse des disponibilités, pourrait s’ajouter la hausse des poids carcasse des chevreaux dans un contexte de fête pascale tardive.